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public n’était pas encore habitué à diriger son épargne vers les fonds d’État[1].

En attendant le déroulement des événemens, nous voudrions cependant fixer, dès à présent, ce point d’histoire : au moment où les États-Unis entrent en scène, dans ce conflit européen que leur intervention vient de transformer en un conflit mondial, comment se présente la situation financière du pays, quelles sont ses ressources, son organisation et les progrès réalisés, en un mot quel est, au point de vue financier, son degré de préparation après trois années d’enrichissement, qui ont eu la valeur d’un demi-siècle et forment la meilleure des préfaces dans une guerre d’usure où les ressources en argent sont l’un des plus sûrs gages de succès ?

Mais cette force financière dont disposent actuellement les États-Unis doit aussi servir à d’autres fins dans l’ordre économique, car ils entendent bien conserver après la guerre la situation que leur a conférée la puissance de leurs capitaux. Ils ont un programme d’expansion mondiale qui s’est dessiné nettement au cours de ces dernières années. Il nous paraît donc intéressant de l’étudier, dans ses grandes lignes, et de coordonner des faits déjà observés, pour montrer, dans cette politique financière, l’une des grandes pensées de ce que l’on appelait avant la guerre l’impérialisme américain. La suprématie des États-Unis sur le marché international, tel est le facteur nouveau dont il faut tenir compte dans nos prévisions d’avenir, en ce qu’il marque un revirement profond dans notre position vis-à-vis de l’Amérique, devenue pôle d’attraction de l’or et grande dispensatrice de capitaux. Ce rôle de banquier du monde, qui appartenait autrefois, pour une bonne part, à la France, passe maintenant aux mains de la grande République alliée. Nous sommes appelés ainsi à nous retrouver plus tard sur ce terrain, lorsque nous chercherons à reprendre notre place comme Puissance financière, et c’est pourquoi il est utile de connaître, dès à présent, les principaux élémens de ce problème d’après-guerre. Les États-Unis nous tendent aujourd’hui

  1. Il a été offert par le public, pour ces deux emprunts, plus de 8 milliards de dollars, soit environ de 45 milliards de francs. D’autre part, dans cette même période, la Croix-Rouge américaine a réalisé, pour son compte, un emprunt public de 100 millions de dollars, ce qui est une preuve de l’ardeur généreuse, comme aussi de la puissance financière des États-Unis.