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d’être connue dès à présent, afin que nous nous rendions un compte exact de la situation telle qu’elle sera après la guerre, l’instant venu pour nous de reprendre nos positions sur les grands marchés internationaux. L’influence allemande sera grandement diminuée, mais nous resterons en présence d’autres compétiteurs non moins forts, qui auront sur nous l’avantage d’avoir apporté leurs capitaux en un moment où les nôtres étaient retirés. Il y aura donc là des situations acquises que nous devrons ménager, et c’est pourquoi nous souhaiterions qu’en vue d’éviter une politique de luttes et de concurrence, il fût possible d’arriver à une entente, pour une collaboration d’hommes, d’idées et de capitaux entre les États-Unis et la France.

Cette collaboration d’hommes et d’idées nous parait la plus importante, dans l’intérêt même des États-Unis. L’Américain du Nord a beaucoup des qualités de l’Anglo-Saxon, mais il n’est point colonisateur, surtout dans l’Amérique latine où il inspire quelque défiance. Il a, certes, le sens du progrès, mais non cette facilité d’assimilation qui caractérise les races latines et leur permet de se modeler suivant le lieu où s’exerce leur activité. Il semble donc qu’une certaine dose d’élémens français pourrait entrer dans les affaires américaines à l’étranger, car elles deviendraient alors de meilleurs articles d’exportation. Nous avons, en effet, une meilleure psychologie d’affaires en pays étrangers, surtout pour ceux avec lesquels nous avons des affinités de race, car nous possédons le don de faire pénétrer tout à la fois nos idées, nos arts, notre civilisation, en même temps que nos capitaux. C’est sur ce terrain qu’une sorte d’association d’intérêts avec les États-Unis peut être mutuellement désirable dans l’Amérique latine, pour conserver nos positions conquises, maintenir nos affaires en pleine activité, tout en facilitant de nouveaux développemens par l’apport du capital américain.

En d’autres termes, il va se produire, après la guerre, un formidable appel de capitaux dans le monde. Cet appel devra se faire à coups de milliards dans les pays de l’Europe qui auront subi plus de trois années d’une effroyable lutte et devront, tout d’abord, panser leurs plaies financières, en consolidant, par des emprunts, leur énorme dette flottante. En ce qui concerne particulièrement la France, il faudra trouver de nouvelles ressources pour réparer les ruines de nos cités, transformer