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Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 43.djvu/948

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pittoresques, des suggestions précieuses ; on y verra comment, en s’adressant par la persuasion à la dignité et à l’orgueil patriotique d’un grand peuple, on peut sans mesure vexatoire obtenir des résultats étonnans. Que nos gouvernans s’inspirent de cet exemple ; que leur sagesse commande celle de tous les Français.


En parlant tout à l’heure de l’énergie calorifique utilisable des divers alimens, j’ai laissé de côté un aspect important du problème qu’il convient d’examiner maintenant.

Tous les alimens ne sont point au même degré dynamogènes et hystogénétiques. L’expérience a démontré que les graisses et les sucres servent à fournir à l’organisme les calories, l’énergie dont il a besoin ; au contraire, les protéines, les albuminoïdes paraissent surtout jouer le rôle d’élémens de réparation, de remplacement, et de croissance des tissus organiques. Comme dynamogènes, les diverses graisses et les divers sucres sont équipollens, si j’ose dire, c’est-à-dire qu’on peut substituer sans inconvénient les uns aux autres dans l’alimentation ; il n’en est pas de même des albuminoïdes qui ne peuvent être complètement remplacés par les substances précédentes, et dont une quantité minima est nécessaire à l’homme.

Celui-ci a besoin chaque jour d’environ une cinquantaine de grammes au minimum d’albuminoïde. Or la viande est le prototype des substances protéiques, et c’est pourquoi il nous faut manger peu de viande, mais il nous en faut. Si dans la ration d’un chien ou d’un homme, on supprime l’albumine, la mort du sujet survient un peu plus tard qu’avec un jeûne complet, mais sûrement. Ce sont les albuminoïdes qui réparent l’usure vitale ; chez l’homme ils entretiennent la maison, chez les enfans ils l’agrandissent. Ils sont le maçon de l’organisme.

Un grand physiologiste français, le professeur Gley, du Collège de France, vient d’attirer l’attention sur des travaux exécutés tout récemment dans les laboratoires physiologiques américains et qui éclairent singulièrement ce rôle de maçon de l’organisme qu’ont les substances protéiques.

On s’est longtemps demandé pourquoi le loup forme des tissus de loup et l’homme des chairs d’homme s’ils mangent l’un et l’autre du lapin. C’est que — et c’est ce qu’ont établi ces découvertes récentes — les divers albuminoïdes de la viande sont constitués par des assemblages complexes de divers corps qu’on appelle les acides aminés. Autrement dit, il y a la même différence entre les