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L’un des Polonais, M. Niegolewski, étonné de l’abstention des Alsaciens-Lorrains présens et l’attribuant à ce que leur ignorance de la langue allemande ne leur avait pas permis de comprendre l’avertissement du président au sujet du vote, eut beau réclamer une nouvelle épreuve par scrutin nominal. « Je pense, répliqua le président, avoir exactement et de point en point observé le règlement. Je ne puis rien de plus, et il ne peut être question d’un nouveau vote sur une chose définitivement réglée. Nous passons donc à un autre objet de l’ordre du jour : première délibération du projet de loi sur la vaccination obligatoire. »

Ainsi la lourde conscience germanique s’imaginait avoir réussi, sans trop de bruit, à étouffer sous la « vaccination obligatoire » la Justice, le Droit, les nobles revendications de tout un peuple opprimé !

Au procès-verbal de cette triste séance sont annexées quelques explications de votes : « Nous déclarons, — disent les huit députés alsaciens-lorrains demeurés dans la salle, les abbés Winterer, Sœhnlin, Simonis, Pliilippi, Guerber, et MM. Ch. Abel et Louis Hartmann, — que nous sommes restés assis, non pour voler avec la majorité, mais pour nous abstenir, et que nous avons agi ainsi parce qu’on nous avait enlevé, par la clôture du débat, la possibilité d’expliquer notre sentiment… »

Fièrement, les députés polonais, pénétrés de cette idée toute chrétienne et latine que la force ne peut primer le droit, affirmaient : « Nous, Polonais, avons déjà, dans la précédente législature, déclaré que nous ne pouvons adhérer au principe de la prépondérance matérielle momentanée en vertu duquel l’Alsace-Lorraine devait être annexée comme prix de la victoire. Nous avons exprimé nos craintes au sujet des effets qu’entraînerait, pour la liberté, la civilisation et la moralité de l’Europe, une acquisition de territoire faite par ta violence… Nous n’avons pu voter l’annexion parce que nous nous refusions à empiéter sur les droits des peuples à disposer d’eux-mêmes[1] »

Les signataires de ces paroles généreuses, — leurs noms doivent être rappelés, — étaient MM. Wladislas Taczanowski, député de Wrzesnia ; Wlad. Niegolewski, député de Poznan ; Erasmus Parczewski, député de Schwelz ; J. Choslowski, député de Gniezno ; Th. Kozlowski, député de Inowraclaw et Mogilno ;

  1. Stenographische Berichte des Reichstages.