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production des objets nécessaires ou agréables à l’humanité. Cette production agricole et industrielle ne peut se développer et se maintenir qu’à l’aide d’installations de plus en plus perfectionnées, de plus en plus coûteuses. Que l’on réfléchisse aux milliards qui s’emploient chaque année à ériger des bâtiments, à ouvrir des routes de terre et de fer, à armer des navires, à construire des machines, à mettre des engrais dans le sol, et l’on se rendra compte des prélèvements que les générations successives ont dû opérer sur leurs revenus annuels pour constituer de nouveaux organes de production, c’est-à-dire des capitaux. A l’origine des sociétés, il n’en existait pas d’autre que le sol lui-même. Le travail des hommes, s’appliquant à un certain nombre d’éléments naturels, parvenait tout au plus à satisfaire les besoins rudimentaires et immédiats des peuplades primitives. Les boltcheviks russes, qui ont mené leur pays où l’on sait, n’ont pas cessé de vouer le capital à l’extermination. Si cela était en leur pouvoir, ils nous ramèneraient à l’âge de la cueillette, de la chasse et de la pêche.

Le capital a été et reste le principal facteur du progrès. Sans lui l’humanité serait restée au régime des productions spontanées du sol, précaires, inégales et limitées. Pour s’affranchir de cette incertitude, l’homme a constitué des approvisionnements et créé des outils. C’est par la prévoyance et l’esprit d’invention qu’il s’est préparé à satisfaire ses besoins à naître, et qu’il a appliqué son travail à la fabrication d’objets devant faciliter la production future. La formation du capital est due au fait que certains hommes préfèrent aux jouissances immédiates la sécurité de l’avenir. L’abstinence crée le capital sous forme d’approvisionnements et sous forme d’installations. Le capital ne se maintient d’ailleurs que par une reproduction incessante. C’est du travail accumulé méthodiquement et continûment en vue d’une production ultérieure. Une maison qui n’est pas entretenue en bon état de réparations ne tarde pas à tomber en ruines ; une usine dont l’outillage n’est pas renouvelé de façon à être toujours à la hauteur du progrès cesse bientôt de pouvoir lutter avec ses concurrents. L’homme qui ne met pas de côté une fraction de son revenu pour faire face aux dépenses imprévues sera obligé, à un moment donné, d’entamer son capital, peut-être de le consommer entièrement.

Nous pouvons nous faire une idée de cette destruction