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c’est dans cette classe d’hommes que se trouvent les bienfaiteurs de nos Musées : nombreux sont les amateurs qui leur lèguent des objets qui servent ensuite à l’éducation artistique et à l’instruction générale des citoyens.

L’impôt sur le capital serait profondément immoral. Il mettrait les contribuables honnêtes, qui se soumettent exactement à la loi, en état d’infériorité vis-à-vis de ceux qui, exaspérés par l’inquisition et l’excès de la taxation, chercheraient à dissimuler une partie de leur fortune.

Quel serait, d’autre part, le résultat de l’établissement de l’impôt sur l’enrichissement ? Beaucoup d’hommes emploieraient l’excédent de leurs revenus sur leurs besoins immédiats à l’achat d’objets qui, sous un très faible volume, représentent une valeur considérable. On ferait rétrograder notre état social vers celui des tribus hindoues, dont les rajahs accumulent des trésors sous forme de métaux monétaires, de diamants, de perles ou de pierres précieuses.

De tels impôts ne peuvent être assis sur des bases rationnelles. Une foule de revenus ne proviennent pas du capital, ou du moins ne proviennent pas d’un capital que le lise puisse saisir. Tels sont ceux qu’engendre le travail sous toutes ses formes, depuis celui du manœuvre ou du terrassier jusqu’à celui de l’artiste, du médecin, de l’écrivain, du professeur. D’ailleurs, à la base même de la conception de l’impôt sur le capital, se trouve un autre vice fondamental, c’est l’extrême difficulté de la perception.

L’amputation d’une partie d’un patrimoine n’est aisée que s’il est représenté par des espèces. Dans la réalité des choses, c’est une fraction presque toujours négligeable de sa fortune que chaque particulier possède sous cette forme. La quasi-totalité consiste en valeurs mobilières, en marchandises ou en immeubles. Parmi les premières, beaucoup sont d’une réalisation difficile, surtout à l’époque actuelle, ou ne pourraient être vendues qu’au prix d’un sacrifice énorme qui équivaudrait, dans bien des cas, à la ruine du possesseur. Pour les immeubles, la difficulté est encore plus grande. Voici un propriétaire qui vit strictement du loyer des appartements qu’il donne à bail. Ne parlons pas de la période de guerre, pendant laquelle il n’a peut-être rien touché, tout en étant obligé à des dépenses d’entretien et autres. Supposons-nous replacés dans