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LES
MAROCAINES CHEZ ELLES


I

Entre les rangs immobiles de la garde, nous traversons la cour d’honneur brûlée de soleil. Sur le seuil d’une porte une négresse nous attend, qui nous mène à travers une autre cour, toute dallée de faïences polychromes, celle qui précède les appartements de cérémonie du Grand Chef.

Nous passons par une troisième porte, gardée par le chef des Eunuques, un grand noir aux yeux d’émail ; ensuite, c’est le dédale des petits patios secrets où bruit l’eau des fontaines, et des couloirs interminables grouillant d’esclaves en vêtements grisâtres qui se rangent contre les murs pour nous laisser passer. De grandes pièces donnent sur ces couloirs, cuisines, offices, lavoirs, on ne sait trop quoi. Curieuses, les négresses nous regardent du seuil, accourues au bruit de notre arrivée. Voici, dans un coin, sur un banc garni de nattes, un esclave qui surveille trois ou quatre grands perroquets gris perchés sur le haut de leurs cages. Ensuite, au bout d’un autre couloir, un escalier en bois, très étroit, que nous montons.

Sur le premier palier, une jeune femme parait, gracieuse et parée, en robe de fête et babouches brodées d’or. Toute souriante, elle nous tend la main, nous regarde avec de grands yeux accueillants, et nous accompagne en gazouillant des mots, hélas ! incompréhensibles. Un deuxième palier, une deuxième