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à pic, tantôt s’allonge en pentes douces vers la vallée de l’Oise. Cette terrasse est traversée, de part en part, par deux routes qui se croisent : la route de Vervins à Saint-Quentin et la route de Guise à Marle ; elles se coupent aux abords de Sains-Richaumont. Ce massif est d’une altitude moyenne de 100 à 120 mètres. Ses vues sont admirables sur le cours de la rivière. Par l’Est, il domine Vervins et l’entrée de l’Oise ; par le Nord, il domine Guise ; par l’Ouest, il domine Saint-Quentin, et, par le Sud-Ouest, la Fère. Au point de vue géographique, la bataille pour Guise Saint-Quentin-la Fère doit s’engager au pied de ce bastion.


II. — LA MANŒUVRE

Mais on ne se bat pas uniquement sur des données géographiques : voyons, maintenant, pour quelles raisons militaires Joffre, choisissant l’heure et le lieu, accroche la bataille ici.

Ces raisons dépendent des marches et des opérations accomplies par les deux armées adverses depuis la bataille de la Sambre.

A la suite de la double défaite de Charleroi et de Mons, les deux chefs des années alliées, French et Lanrezac, avaient donné l’ordre de la retraite, et leurs décisions avaient été approuvées et étendues à tout le front français par l’Instruction du 23 août. Joffre avait décidé de donner du champ à ses troupes pour leur permettre de reprendre haleine et de recevoir des renforts, et pour se donner à lui-même le temps de manœuvrer.

Mais il avait gardé la ferme résolution de ressaisir, au plus tôt, l’initiative : l’ordre de retraite n’était, dans sa pensée, que la préparation d’une nouvelle et prochaine offensive. Cette conception s’était traduite, dans l’Instruction, par le paragraphe Ier, qui domine et mène tous les autres : « La manœuvre offensive projetée n’ayant pu être exécutée, les opérations ultérieures seront réglées de manière à reconstituer, à notre gauche, par la jonction des 4e et 5e armées, de l’armée anglaise et de forces nouvelles prélevées dans la région de l’Est, une masse capable de reprendre l’offensive, pendant que les autres armées contiendront, le temps nécessaire, les efforts de l’ennemi… »