Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 47.djvu/441

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

doublées dans un grand nombre de secteurs et de grands travaux entrepris partout. Pour être à même d’attaquer sans dévoiler le lieu choisi, Ludendorff procédait à un équipement général du front. Tel était le premier avantage que lui apportaient ses disponibilités de matériel. Chaque jour, par la presse hollandaise, nous avions les échos de ces préparatifs. Les Allemands disposaient, pour la reprise de la lutte, de 207 divisions dont 80 à l’entraînement. Nous pouvions disposer de 160 environ. Une supériorité de 50 divisions restait à nos adversaires.

Mais cette supériorité, il ne fallait pas se borner à l’envisager uniquement sous l’aspect du nombre : tandis que nos troupes devaient à intervalles réguliers subir l’immobilité de la vie de secteur, les divisions allemandes, formant masse de manœuvre ; étaient soumises à un régime spécial et à un entraînement intensif. A nombre égal, la qualité n’était plus la même. A cela s’ajoutait l’inconvénient d’une armée composée de nationalités différentes en face d’une armée allemande homogène. Le problème des effectifs, comme l’avait prévu le commandement français, primait tous les autres. Seul, l’apport américain pouvait rétablir l’équilibre. Il fallait gagner du temps.


LA CAMPAGNE DE 1918. — LA NOUVELLE MÉTHODE ALLEMANDE

Le 21 mars, l’Allemagne commençait la campagne de 1918. Les résultats immédiats et la méthode employée nous montrèrent que nos ennemis avaient comme nous tiré tous les fruits des enseignements de trois années de guerre de siège.

Tandis que par le char d’assaut nous étions parvenus à supprimer les lenteurs de la destruction des positions adverses, ils arrivèrent au même résultat par l’emploi des obus toxiques. Leur méthode d’attaque essayée pour la première fois sur le front russe, le 3 septembre 1917, par le général von Hutier, a gardé le nom de « manœuvre de Riga. » Cette méthode repose tout entière sur le facteur surprise. En fait, il semble bien que dans nos recherches nous n’avions fait entrer la surprise que comme un élément de surcroît. Le char d’assaut, dans notre dessein primitif, constituait- surtout l’artillerie d’accompagnement de l’infanterie. L’affaire de Cambrai fut une révélation et accrut la valeur de l’engin.

Mais Ludendorff, étant parti du concept surprise, en avait