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et de noter qu’il n’est pas une de leurs assurances qui n’ait été immédiatement démentie par le fait. La manœuvre de Foch est si parfaitement, si purement française, si peu allemande (quoique les von Ardenne et les Salzmann, maintenant qu’elle a réussi, s’ingénient à la rattacher à l’école des Clausewitz, des Moltke et des Schlieffen), elle est si radicalement antiallemande, qu’aujourd’hui même, même après leur défaite, les Allemands n’en conçoivent les parties, les diverses actions sur la Marne, sur l’Aisne, sur l’Oise, sur la Somme, sur la Scarpe et la Lys, que séparément, ne se représentent pas qu’elles sont liées, et n’y découvrent pas ce qui nous frappe, ce qui est notre marque : le jeu des unités classiques. Mais il faut se borner et il faut choisir. Au milieu de ces bavardages embarrassés, il y a un point fixe. C’est évidemment le point de direction donné de la Wilhelmstrasse à toute l’Allemagne : enfoncer dans toutes les têtes allemandes l’idée que l’Empire soutient, à son corps défendant une sorte de guerre sainte. Sous une autre forme, sous une forme doctrinale et doctorale, revient le : « Je n’ai pas voulu cela. » L’antique Gazette de Voss se refait, pour cette dénégation et cette affirmation, une jeune énergie : « Que nous nous battions sur la Marne, sur la Somme, sur la Meuse ou sur le Rhin (remarquons l’allusion à ces deux fleuves qui n’est probablement pas jetée à l’aventure), nous ne cesserons de le faire pour nous défendre. C’est en quoi réside notre force, par quoi nous sommes invincibles. La situation ne deviendrait périlleuse que lorsque nous l’oublierions. Une armée allemande qui se bat pour ses foyers ne sera jamais vaincue : jamais, jamais, jamais. » Il est d’observation historique, constante et sans exception, que l’accumulation outrancière de trois «Jamais » n’a jamais porté bonheur à ceux qui les ont prononcés; mais passons. Pour vénérable qu’elle soit, la Gazette de Voss, la « tante Voss, » comme on se plaît à l’appeler en Allemagne, n’est qu’une gazette. Le comte Hertling est le chancelier de l’Empire, et ce qu’elle dit avec une espèce de rage, il le répète avec les finesses et les souplesses qu’enseigne à un Allemand même, quand il y a vécu sa vie entière, la familiarité de la casuistique ; cependant, l’habitude de tout prouver entraîne à vouloir trop prouver. Le chancelier ne se contente pas de dire que la guerre soutenue par l’Allemagne est maintenant pour elle une guerre défensive : il insinue, ou plutôt il déclare, qu’elle l’a toujours été. « Nous avons, dès les premiers jours, considéré cette guerre comme une guerre de défense. Il s’agit là-bas de défendre notre tranquillité et de protéger le sol de la patrie. Nous continuerons à y combattre. Nos