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assimilées, sauf tempéraments destinés à parer aux injustices trop marquées, puis de hausser le taux de l’impôt global et celui de la taxe sur le revenu des valeurs mobilières, enfin d’accroître parmi les impôts indirects ceux qui ne frappaient pas les consommations de première nécessité. Fort bien conçu et équilibré, c’était le plan d’attente, ou de fortune, le mieux fait, semblait-il, pour réserver l’avenir et soulever quant au présent le moins d’opposition au Parlement, le moins de trouble dans le pays. — Or, voici qu’au Palais-Bourbon, d’un geste dédaigneux, sans phrase et comme par prétérition, la commission du budget l’écarta de prime abord : elle repoussa le doublement des contributions directes, elle ajourna le reste, laissant entendre de façon quelque peu sibylline que ce qu’elle voulait, c’était l’achèvement de l’ancien plan Caillaux, c’était, — pour heur ou malheur, — la « révolution » fiscale.

L’impression produite par ce coup de théâtre fut considérable. Beaucoup le déplorèrent. N’était-ce pas par une redoutable incompréhension des nécessités présentes que la Chambre faisait au crédit public cette injure de différer l’établissement d’impôts nouveaux ? N’était-ce pas une lourde responsabilité qu’elle assumait de rompre l’union sacrée ou de s’en servir pour faire œuvre départi ? N’était-ce pas une témérité singulière que de vouloir improviser en temps de guerre un nouveau régime fiscal, au risque de désorganiser les finances de la France ? — En revanche, dans la majorité parlementaire dominait ce sentiment que plus que jamais la réforme fiscale était nécessaire et urgente. La guerre, disait-on, nous a trouvés fiscalement désarmés, incapables de tirer un surcroît sérieux de ressources de nos vieilles contributions « boiteuses et stériles, » de notre ancien système « défaillant, » « rigide et exsangue. » Devant l’énormité des charges qui s’amoncellent, il est plus que jamais indispensable de doter ce pays de l’instrument nouveau, souple et productif, qui permettra de serrer la réalité de plus près et de modeler l’effort de chacun sur ses capacités. Plus lourd est l’impôt, plus il y faut d’équité, si l’on veut que chacun remplisse son devoir avec courage et sans arrière-pensée. D’ailleurs, puisque nous avons déjà le « global, » il nous faut bien les « cédulaires, » qui sont la base de l’édifice dont celui-là est le couronnement : l’un ne va pas sans les autres. Enfin il ne faut pas que le gouvernement soit tenté