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correspond à des avances faites aux gouvernements étrangers[1] ; la charge en est imputée sur les crédits trimestriels de guerre. On regrette enfin de n’y trouver aucun crédit ouvert pour l’amortissement. Combien pourtant n’aurait-il pas été désirable, et nécessaire, en présence de la hausse si rapide de notre dette en capital, de voir cet amortissement commencer ab ovo, à l’exemple de ce qui se passe en Angleterre ![2]

D’autre part, nous voyons bien dans le budget les recettes créées, mais nous ne voyons pas ce qui aurait dû en être la contre-partie, les économies réalisées. Après quatre ans de provisoire, pendant lesquels l’esprit de prodigalité s’est plus que jamais donné cours, c’était cependant pour les services publics l’occasion de faire leur « inventaire budgétaire, » et d’inaugurer une sévère politique d’épargne, comme les y invitait sagement le ministre des Finances. Comment croire qu’à l’effort fiscal si vigoureux a correspondu un suffisant effort de compression des besoins, quand nous voyons que de 1914 à 1918 les dépenses générales d’administration, dette exclue, ont augmenté de plus de 50 pour 100[3] ? Il y avait des causes d’augmentations inévitables, la hausse du prix des denrées, et, dans une certaine mesure celle du prix des services des fonctionnaires. Mais la prudence, disons même l’honnêteté, exigeait que les accroissements fussent pour une large part compensés par des économies : on ne nous fera pas croire qu’il eût été bien difficile d’en trouver ! Cela est d’autant plus grave que le nouveau budget fera « précédent : » l’abus à qui il ouvre la porte sera affermi dans la place, et c’est même cette crainte de la consolidation du gaspillage qui fait qu’on a vu l’idée de la

  1. Aucune prévision n’est faite d’autre part pour les intérêts afférents (en 1918) aux bons du Trésor français remis, en garantie d’avances, à la Trésorerie britannique ; selon accord avec le gouvernement anglais, ces intérêts se capitaliseront et feront l’objet d’avances nouvelles.
  2. Il a bien été créé un « Fonds spécial des emprunts de la Défense nationale, » destiné à faciliter la négociation des rentes nouvelles en même temps qu’à en inaugurer l’amortissement ; mais cet amortissement n’est qu’apparent, puisque les charges du Fonds spécial sont « provisoirement » imputées sur les crédits trimestriels de guerre et supportées par l’emprunt.
  3. Au budget de 1914 : 2 075 millions (total des dépenses moins la dette et les services militaires). — Au budget de 1918 : 3 191 millions. Les garanties d’intérêt aux Compagnies de chemins de fer figurent au budget actuel pour 158 millions, au lieu de 17 au compte de 1913 ; le déficit des chemins de fer de l’État, pour 220, au lieu de 82 : une sage politique ferroviaire nous eût épargné ces augmentations.