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Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 48.djvu/454

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Les faits étaient, en 1916 déjà, si nombreux et si patents, qu’un premier souci se manifesta presque aussitôt chez les Alliés de l’époque : celui de se réserver par préférence les ressources dont ils disposeraient à la paix pour s’aider mutuellement à réparer leurs ruines. Ce fut l’objet essentiel de la conférence économique qui se tint alors à Paris. Mais, bien des obstacles s’interposaient entre les vœux de la conférence et leur réalisation : les uns provenaient de l’incertitude des rapports douaniers de la Grande-Bretagne avec ses Dominions ; d’autres, des résistances libre-échangistes des derniers adeptes de l’école de Manchester ; d’autres encore, de la difficulté qu’il y a à tirer l’opinion française de sa passivité coutumière, autrement que par une initiative gouvernementale hardie ou sous l’action d’un danger extérieur poignant ; les derniers enfin, du doute où l’on demeurait sur l’attitude définitive qu’adopteraient les États-Unis dans le conflit mondial.

Depuis deux ans, ces obstacles ont disparu l’un après l’autre : l’Angleterre s’est résolue à resserrer ses liens économiques avec ses colonies ; toutes ses industries, sauf deux ou trois, réclament soit l’aide gouvernementale directe, soit la protection d’un tarif contre la concurrence déloyale du dumping ; en France, l’individualisme regimbe encore quelque peu, tant à changer radicalement ses anciennes relations d’affaires qu’à adopter les méthodes indispensables pour s’organiser rationnellement contre l’invasion du commerce allemand et pour le salut de notre exportation, mais les résistances vont s’atténuant chaque jour à raison du fait capital et décisif qu’a été l’entrée des Etats-Unis dans la lice, et la volonté expresse qu’ils ont tout aussitôt manifestée d’introduire de l’ordre dans la gestion des intérêts économiques de l’Entente. Un rapide coup d’œil sur l’évolution déjà accomplie à cet égard et sur celle, plus radicale encore, que préparent des faits récents, permettra de s’en rendre compte.

Dans un discours prononcé à la Chambre des députés le 28 juin dernier, discours complété par M. Tardieu, notre Haut-Commissaire près des Etats-Unis, M. Clémentel, ministre du Commerce, s’est expliqué avec une bonne foi entière et une parfaite lucidité sur la délicate question des consortiums : il ne s’agit de rien moins que de l’organisation commerciale du