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En revanche, le problème d’un vaccin préventif, analogue à celui de la variole, est infiniment plus important, et sa solution a un grand intérêt pour l’avenir. Un vaccin fait en partant du virus grippal immuniserait les bien portants à la fois contre la grippe et du même coup contre ses complications. Il est probable que, dans un avenir plus ou moins éloigné, on vaccinera ainsi tout le monde, comme on fait déjà contre la variole.

Ce sera le meilleur moyen de mettre l’humanité à l’abri des atteintes futures du fléau qui a déjà fait tant de ravages. Malheureusement, étant donné que la découverte de Nicolle et Lebailly est toute récente, il faudra encore du temps pour mettre au point, étudier, expérimenter, puis fabriquer en grand ce vaccin. L’épidémie actuelle aura cessé bien avant, et l’avenir seul en profitera ; mais il faut aussi travailler pour le futur, car le futur c’est l’an prochain.

Pour le présent, il y a quelque chose de plus immédiat à tenter : c’est la réalisation d’un vaccin contre les complications grippales. Si un tel vaccin pouvait être fait, et si on l’inoculait à tout grippé, au début de sa maladie, et avant le déclenchement des complications, ou à tout bien portant placé dans un milieu contaminé, on empêcherait du coup, et dans tous les cas, les séquelles si graves de la grippe. Celle-ci ne serait plus qu’une maladie toujours contagieuse, mais sans importance, puisque les grippés n’auraient que la grippe sans plus.

C’est à ce passionnant problème que vient de s’attaquer résolument l’Institut Pasteur. Comme les trois bacilles des complications sont des microbes depuis longtemps identifiés, dont on connaît les milieux de culture et les conditions de résistance, il n’a pas été difficile d’entrer d’emblée au cœur du problème. D’autant qu’il existe depuis longtemps un sérum antipneumococcique et un sérum antistreptococcique qui sont bien étudiés et qui ont donné d’ailleurs, entre les mains de praticiens avertis comme le docteur Netter et le docteur Violle, d’heureux résultats curatifs dans les séquelles broncho-pulmonaires de la grippe. L’Institut Pasteur vient donc de fabriquer un vaccin mixte, dans lequel entrent, en proportions soigneusement calculées, les trois sortes de bactéries en question : pneumocoque, streptocoque, Pfeiffer.

Les plus grands espoirs sont d’autant mieux permis dans cette voie qu’une expérience analogue, quoique destinée initialement à un but différent, vient de donner dans l’armée britannique des résultats tout à fait frappants.