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fortifications du Bas-Rhin, il entra à Cologne sa voiture dételée, traînée par les bourgeois enthousiasmés. On le vit au port, dans les fabriques, dans les entrepôts, étudiant sur place les questions de navigation, les procédés de l’industrie, s’informant, critiquant, talonnant ses fonctionnaires, encourageant commerçants et artisans. Coblence, pendant deux jours, le reçut dans les ovations. A Mayence, il donna audience aux députés des princes de la rive droite, avides d’ores et déjà d’entrer en sa clientèle, saluant le nouveau César « si ressemblant, — la platitude allemande éclate en cet hommage, — au premier de nos Césars romains qui franchit le Rhin pour chasser les Barbares. » À Frankenthal, il prit un bateau, descendit jusqu’au pont de Mannheim afin d’inspecter le canal. Il rentra par Trêves et Luxembourg, laissant derrière lui cette trace lumineuse qui, des années durant, subsistait, éclairant ses fonctionnaires et éblouissant ses peuples.


Le régime, — dès 1804, — était en pleine activité. Pas un instant jusqu’en 1813, il ne cessera de fonctionner sur la rive gauche à la satisfaction des peuples.

Quiconque a étudié l’administration consulaire et impériale, sait quels hommes Napoléon appelait à la tête des départements. Les choisissant dans tous les milieux, dans tous les partis, il ne leur demandait point compte de leur passé, n’exigeant d’eux qu’une capacité servie par un infatigable travail. On les verra de Rome à Hambourg, d’Amsterdam à Florence, — pour ne parler que des départements nouveaux, — se faire en quelques mois les hommes de leurs administrés en même temps que le représentant actif des principes du gouvernement. La rive gauche du Rhin ne connut que des préfets distingués, — parmi lesquels deux des plus illustres, Jean-Bon Saint-André, préfet du Mont-Tonnerre à Mayence, Lezay-Marnesia, préfet de Rhin-et-Moselle à Coblence, — un ancien conventionnel du côté gauche, un ancien constituant du côté droit.

Celui qui devait le plus marquer fut Jean-Bon : rude Cévenol, ancien membre du Comité robespierriste, de cette formidable équipe qui, en l’an II de la République, avait sauvé le pays en le surmenant, travailleur acharné, peu courtisan, parfois incommode, mais si fermement convaincu qu’il se devait corps et