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Capelle, il ne se passait pas de jour où Castelnau ne s’exposât aux avant-postes. L’ennemi en profita plus d’une fois pour s’amuser à percer son chapeau ou pour envoyer, dans son justaucorps, une décharge qui en brûlait l’étoffe ou en roussissait les galons. Par ailleurs, et tandis que le combat se livrait en plaine, les mousquetaires, qu’ils fussent gris ou noirs, les chevau-légers et les dragons eussent été embarrassés de suivre à la charge un cavalier de son mérite. Au second siège de Mardick, il fit merveille à la tête du régiment de Picardie ; enfin, c’est lui, au combat des Dunes, placé à l’avant des escadrons de l’Altesse et du Grand Maître, qui défonça le carré des Impériaux.

La première bataille d’importance à laquelle le marquis de Castelnau prit part, auprès de Turenne et de Condé, fut à Fribourg-en-Brisgau, le 3 août 1644. Le général des ennemis était Mercy ; et ce général, depuis la mort de Wallenstein, de Spinola et de Gustave le roi de Suède, était bien, avec Gallas et Piccolomini, le plus redoutable de ceux qui eussent paru, dans la longue guerre de Trente Ans, du côté de l’étranger.

Aussitôt prévenu de la manière toute d’honneur dont le régiment Mazarin s’était comporté sous les ordres d’un tel chef, au cours de cette rencontre, le cardinal ne voulut pas différer plus longtemps d’exprimer au duc d’Enghien la satisfaction qu’il avait ressentie à l’endroit d’un homme qui défendait si bien ses couleurs. De Paris, à la date du 17 août 1644, il écrivait au Prince : « Je crois que le sieur de Castelnau sera bien aise de continuer à servir avec mon régiment ; dans l’assurance qu’il doit avoir que, dans la bonne opinion que vous avez de lui et de l’inclination que j’ai pour sa personne, je lui procurerai des avantages dont il aura sujet d’être content. »

Le principal de ces avantages est que M. de Castelnau fut, après Fribourg, élevé au grade de maréchal de camp ; mais, l’année suivante, après la bataille de Nordlingen, Son Eminence devait le nommer maréchal de bataille. C’étaient là de beaux titres et par lesquels Castelnau commençait de prétendre à ceux que de nouveaux succès allaient lui mériter : le grade si recherché de lieutenant-général et, la veille même de sa mort, au lendemain du combat des Dunes, cet autre grade, le plus élevé de tous en dignité et en faveur : celui de maréchal de France.