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Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 48.djvu/665

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Aussi bien un détail en dit long et nous renseigne sur l’installation des « otages. » Si les Allemands ont parfois autorisé qu’on fit des photographies de l’extérieur des baraques, ils se sont toujours refusés à ce qu’aucune vue fût prise des « intérieurs. » « Le matériel de l’établissement, ajoute Mme V… comportait, pour chacune de nous, une cuiller en fer, deux cuvettes émaillées et deux petits torchons gris, grands à peine comme un mouchoir et destinés indifféremment à l’essuyage de notre « vaisselle » et à notre toilette. Ils ne furent jamais remplacés pendant toute la durée de notre captivité. Pour nous laver, nous disposions d’un seau et d’un broc pour vingt-cinq ! Le matin, on nous apportait quelques seaux d’eau chaude ; mais les plus promptes, les plus débrouillardes avaient seules la chance d’en profiter. Encore cette eau servait surtout à nettoyer notre linge. Au début, nous avions laissé ce soin à des prisonnières du camp, mais elles s’en acquittaient si mal et elles étaient couvertes de tant de poux que, bientôt, nous en arrivâmes toutes à faire nos savonnages nous-mêmes… »

Les chambres étaient garnies de poêles. On les allume une partie de la journée ; mais le bois et le charbon sont parcimonieusement mesurés ; les prisonnières souffrent cruellement du froid. Les minces cloisons de planches de leurs baraques ne les protègent qu’imparfaitement contre la température excessive du dehors. Presque toutes ne tardent pas à tousser. Quand vient l’été, elles subissent un supplice opposé. Le soleil qui darde ses rayons sur les baraques en transforme l’intérieur en fournaises. L’air est irrespirable, on étouffe là-dedans. « La sueur nous coulait, sans arrêt, le long du visage, sur tout le corps et collait nos cheveux à nos tempes. » Pour surcroit de souffrances, les insectes se mettent à pulluler. Les paillasses grouillent de puces et souvent de punaises. « de celles-ci, en une seule nuit, une des prisonnières tua quatre-vingts. « Quand nous étions couchées, il nous en tombait sur la figure, comme une pluie. Nous ne pouvions plus dormir un seul instant. Toutes, nous avions le corps couvert de boutons. »


Le lendemain de leur arrivée, les « otages » durent subir une visite corporelle. « On nous fit défiler entièrement nues devant des Allemandes qui nous examinèrent curieusement ;