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dérogations au principes des nationalités. Entre des revendications également âpres, entre des nécessités contradictoires, les diplomates devront, comme toujours, trouver des transactions. Ces transactions exigeront des sacrifices douloureux et léseront des intérêts respectables ; elles léseront davantage encore certaines ambitions.

Les décisions de la diplomatie n’ont pas d’ailleurs, par elles-mêmes, d’efficacité propre contre la volonté des peuples. Quand le prochain Congrès de la Paix aura établi un certain ordre de choses, — qui deviendra le droit futur, — seule la force pourra, demain comme hier, imposer au monde Le respect de ce droit.

La force appartient, actuellement et pour un temps, sans contrepoids, aux Puissances de L’Entente… Après avoir terminé victorieusement la guerre imposée au monde par l’Allemagne, elles sont tenues d’achever leur œuvre, en prenant des dispositions efficaces et pratiques pour éviter, — dans toute la mesure des bonnes volontés et des possibilités humaines, — les occasions d’un nouveau grand conflit.

Elles ont, en particulier, à protéger leur œuvre contre un danger visible et proche, qui- est le désir de revanche de l’Allemagne.

Nous ne demandons qu’à vivre en paix avec la nation allemande… Mais nous n’oublierons jamais, nous ne devons pas oublier des leçons qui sont d’hier. C’est le peuple allemand qui a voulu la guerre. D’innombrables documents publiés pendant ces quatre années nous ont montré combien étaient universellement répandus en Allemagne l’esprit du Deutschland über Alles, les désirs d’hégémonie, le besoin d’annexions territoriales. Des traités conclus pendant la guerre même ont étalé la manière dont le gouvernement allemand d’hier comprenait et exerçait, le cas échéant, le droit de conquête. Ces traités ont reçu l’approbation du Reichstag, y compris la majorité des socialistes, y compris le chancelier d’aujourd’hui. Ils ont été accueillis avec enthousiasme par le pays. Il y a quelques mois encore, quand l’opinion allemande n’avait pas cessé d’escompter une victoire militaire sur Le front occidental, la presse d’outre-Rhin exposait, sans scrupule ses demandes d’annexions à nos dépens. Enfin, jusque dans ces derniers jours lors des premières demandes d’armistice, les preuves n’ont pas manqué que le parti militaire, considérant la guerre comme une partie