Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 48.djvu/903

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ces paroles, qui devaient apporter à l’avant, aux troupes automobiles, un légitime sentiment de fierté et de joie, furent répandues dans la zone de l’intérieur par la voie de la presse[1].

Depuis quelque temps, l’opinion publique, d’abord assez défavorable aux automobilistes, avait commencé de revenir à des sentiments plus justes ; les affaires de l’Artois et de la Champagne avaient ouvert bien des yeux. La révélation de Verdun fit s’achever, d’un coup, ce mouvement de volte-face. On faillit même, — il en est souvent ainsi dans les affaires humaines, — aller un peu loin et tomber d’un excès dans un autre et peu s’en fallut que l’on n’applaudit les quelques exaltés qui criaient très fort :

— Ce sont les automobilistes qui ont sauvé Verdun !

Par la suite, les choses furent mises au point ; et, aussi bien, la vérité toute nue, ici comme partout ailleurs, était encore préférable.

Ce que le général en chef voulait dire, et disait si bien, ce n’était pas précisément que les automobilistes avaient sauvé Verdun ; mais c’est qu’ils avaient joué, auprès de leurs camarades des autres armes, un rôle de la plus haute importance ; c’est qu’ils avaient aidé puissamment à l’action de l’infanterie, c’est qu’ils avaient rendu possible la riposte immédiate de nos canons aux canons de l’ennemi. Ce qu’il voulait dire aussi, en les mettant à l’honneur, c’est qu’ils avaient vraiment été à la peine ; c’est enfin que, de ces pages épiques, ils avaient écrit quelques-unes, en les éclaboussant d’un peu de leur sang !

Ainsi donc le Service automobile avait maintenant sa place marquée officiellement auprès des armées combattantes : simple organe de transport au début de la campagne, il s’était manifesté peu à peu comme une force de guerre, dont les autres forces de guerre ne pouvaient plus se passer.

Les automobilistes continuèrent donc, autour de Verdun sauvé, leur labeur quotidien. Avril, mai, juin, juillet, août furent encore de rudes mois. Puis tout s’apaisa : l’ennemi, battu, décimé, écrasé, renonçait définitivement à sa magnifique proie.

Le moment a paru venu de tenter, avec le recul nécessaire, de faire le récit des événements du printemps de 1916, au point de vue très particulier des transports automobiles, et d’explorer,

  1. Publiées dans le Bulletin des armées du 5 avril 1916.