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au cours d’un transport de blessés effectué sous un bombardement particulièrement intense. Est mort des suites de ses blessures. »

J’ai dit à celui qui me fournissait ces noms :

— Mais vous ne me donnez que des morts !

Il a répondu :

— Il le faut bien !… Aujourd’hui, celui qui revient vivant, personne n’admettra jamais qu’il ait eu du courage, ou même qu’il ait couru le moindre danger !

Qu’objecter à cela, qui est la triste vérité ?


V

« Il y a des noms qui vibrent comme une sonnerie de clairon : il suffit, de les prononcer pour qu’aussitôt surgissent, à leur appel, des mirages de gloire[1] ! »

Verdun est un de ces noms-là.

Tout a été dit sur l’importance de la bataille, sur les conséquences de l’échec allemand. Dans une note aux armées du 28 août 1916, dans laquelle il exposait la marche des opérations des Alliés, le général Joffre écrivait :

« Ce résultat a été acquis grâce à la résistance de l’armée française à Verdun, où l’Allemagne comptait lui porter le coup décisif. »

Déjà en mars, il avait dit aux vaillants soldats de la première heure :

« Le pays a les yeux sur vous. Vous serez de ceux dont on dira : ils ont barré aux Allemands la route de Verdun ! »

Depuis, les critiques militaires, les historiens, les artistes, les poètes, ont dit, chacun dans leur langage, la grandeur et la beauté de l’immortelle épopée. Il n’est pas jusqu’à la Muse populaire qui n’ait griffonné, pour les chanteurs des faubourgs, quelques strophes enthousiastes :

<poem> Ils disaient tous à l’avance : Nous voulons vaincre la France, Le roi de Pruss’ command’ra à Paris !… Mon vieux, viens-y !

  1. G. Havard, Bayard.