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AU LENDEMAIN DE LA VICTOIRE

L’Alsace et la Lorraine ont fait retour à la France. Elles lui sont revenues dans la joie. Les manifestations éclatantes, qui ont marqué l’entrée des troupes françaises dans les grandes villes, comme dans les moindres bourgades, remplacent avantageusement le plébiscite que quelques théoriciens s’obstinaient à exiger avant la reprise des deux provinces par leur légitime propriétaire. La question de droit est donc liquidée.

Restent à régler certaines questions de fait, qui sont d’une importance capitale, si on ne veut pas qu’à la joie sans mélange de la population alsacienne-lorraine succède la déconvenue. Pendant quarante-sept ans les annexés, tout en gardant précieusement le dépôt des sympathies nationales de leurs pères, n’ont pas vécu de la vie française. Bien mieux, ils devaient fatalement s’en écarter chaque jour davantage. Ils appartenaient à un organisme étatique qu’ils haïssaient, mais auquel il fallait bien accommoder leurs institutions particulières, pour ne pas s’exposer à de nouvelles mesures de rigueur et pour éviter la ruine complète et définitive.

Il y avait en Alsace-Lorraine trois législations qui se superposaient : la législation de l’Empire, la législation française d’avant 1871, les lois votées par le Parlement local. Comme on le sait, la compétence de l’Empire, en matière législative, était limitée. Elle ne pouvait porter que sur les matières énumérées à l’article VI de la Constitution. Pour toutes les autres matières, les États pouvaient légiférer à leur guise.

Quand les Allemands s’emparèrent de l’Alsace-Lorraine, ils y maintinrent toutes les lois françaises. Ce sont ces lois qui, en partie, furent modifiées par le Parlement de Strasbourg, d’accord avec le Conseil fédéral.