commander ne commande plus, celui qui doit obéir n’obéit plus. Toutes les solutions deviennent mauvaises, quand toutes les issues commencent à se fermer.
Von Kluck n’eût pas eu tant d’assurance s’il eût été mieux renseigné sur ce que lui préparait le Commandement adverse et sur ce qui se passait dans le camp retranché de Paris.
Le Commandement allemand ignorait-il réellement l’existence de l’armée Maunoury ? C’est un point qu’il est assez difficile d’éclaircir. D’une part, von Kluck, ayant eu affaire à diverses reprises aux corps de l’armée Maunoury, et notamment dans le rude combat de Proyart, savait, à n’en pas douter, que cette armée existait sur sa droite. Nous avons cité l’extrait d’un document allemand, — probablement un rapport, — et qui signale la présence de corps actifs (le 7e corps) sur la Somme. Nous avons vu, d’autre part, que les renseignements allemands provenant des armées de l’Est avaient mentionné le transfert de troupes françaises dans la direction de Paris. Malgré tout, les historiens de l’Etat-major et, en particulier, Stegemann, disent que von Kluck était mal renseigné. La brochure sur Les Batailles de la Marne (attribuée, à tort ou à raison, à un écrivain de l’entourage de von Kluck) assure que, « pendant sa marche en avant, le général s’était déjà heurté aux 61e et 62e divisions de réserve sous le général d’Amade qui, plus tard, firent partie de la 6e armée : mais que les Français avaient réussi à se soustraire à leur adversaire. » « Le général von Kluck, ajoute la brochure, savait qu’il se trouvait encore des troupes à gauche du corps expéditionnaire anglais, mais il en ignorait la force exacte. »
Le général lui-même aurait dit, d’autre part, qu’il n’ignorait pas l’existence de l’armée Maunoury, mais qu’il n’aurait jamais pensé qu’il se trouverait un gouverneur d’une place assiégée ayant l’audace de faire sortir ses troupes du rayon d’action de la forteresse.
Quelle que soit la valeur de ces explications, données, d’ailleurs, après coup, von Kluck n’y regarde pas de si près dans sa hâte d’agir et de réussir, il a les yeux fixés non en arrière, mais en avant. Croyant trouver devant lui une brèche et une armée défaillante, il fonce : or, il trouve l’armée de Joffre debout, bien liée et prête au combat.