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le nombre des vaisseaux disponibles. Les frets auraient augmenté beaucoup même sans la mine et la torpille ; a fortiori ont-ils dépassé tout ce qu’on avait jamais vu par suite de l’action destructive de celles-ci. La conséquence de cette hausse énorme des frets a été celle des prix des navires à cargaison, — ou, comme on dit dans le patois maritime, des cargo-boats, — sans que la construction très insuffisante des navires nouveaux réussisse à compenser cette hausse. Il en est résulté que le contenant, le navire, s’est trouvé généralement plus précieux que son contenu, que la cargaison elle-même et que le renflouement d’une coque, même très avariée y est devenu une entreprise extrêmement alléchante et à grand rendement. Comme le disait M. Hutter, ingénieur du génie maritime, dans une intéressante étude qui m’a été précieuse, une coque renflouée, même en tenant compte des réparations qu’elle devra subir, représente actuellement une valeur supérieure au prix d’acquisition du navire neuf avant la guerre.

Quant aux marchandises transportées, si généralement elles sont périssables et attaquées par l’eau de mer (grains, coton, sucre, produits chimiques, fers d’aciers), elles sont pourtant dans d’autres cas assez nombreux récupérables, comme le caoutchouc, le bois, le charbon, divers métaux, etc. Il ne faut pas oublier d’ailleurs qu’un grand nombre des navires coulés depuis la guerre, sans renfermer des trésors monnayés comparables aux richesses d’ailleurs assez hypothétiques des galions de Vigo, transportaient des sommes importantes. Ainsi le Lusitania, qui repose par environ 80 mètres de fond aux abords de l’Irlande, renfermait dans ses soutes plus de 5 millions en or, et des bijoux et valeurs négociables pour de nombreux millions


Le renflouage d’un navire est une opération qui se traduit en tenant compte de ces divers éléments par une opération arithmétique où on met en balance les frais probables d’une part, les profits éventuels, d’autre part, et dont le bilan est en général largement positif. Ce qui précisément le rend en général à la fois possible et fructueux, c’est que le plus grand nombre des navires coulés par la piraterie allemande gisent sur des fonds de moins d’une centaine de mètres, aux abords immédiats des côtes d’Europe et surtout de la Grande-Bretagne et de la France.

Cette circonstance heureuse, — s’il est permis d’employer ici