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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




« Les Bavarois, notait Montesquieu dans ses Voyages, en 1728, sont plus stupides que les Allemands ne sont.-» Et déjà, un demi-siècle avant lui, l’auteur d’un gros ouvrage sur les États, empires, Royaumes et principautés du monde, Davity, ne les avait pas mieux jugés : « Pour le regard de ceux de Bavière, ils sont si sales, si rudes et si brutaux, que, si l’on vient à les comparer au reste des Allemands, on les pourra justement nommer Barbares. » Ce n’est que plus tard qu’ils ont bénéficié de la bonne réputation, en partie usurpée, de l’Allemagne du Sud par comparaison avec l’Allemagne du Nord ; plus l’Allemagne prussienne se découvre, plus on regrette l’autre, et plus on la préfère, sans l’avoir jamais aimée ; à mesure qu’elle s’éloigne, et que la Prusse grandit en se rapprochant, cette ancienne Allemagne paraît moins haïssable. Mais il ne faut ni la voir à l’œuvre, ni la mettre l’épreuve. La guerre de 1870 en avait entamé la légende : les horreurs des années dernières l’ont complètement ruinée ; et les fureurs de la révolution munichoise sont en train d’en disperser les restes.

Fureurs encore relatives, mais, à tout le moins, excès menaçants. L’agitateur populaire qui avait chassé les Wittelsbach et, en quelques heures, édifié sa dictature sur les débris de leur trône, Kurt Eisner, a été assassiné le 21 février. La personnalité du meurtrier, qui est un comte Arco-Valley, d’une vieille famille tyrolienne de militaires et de diplomates, donne à cet acte de violence, s’il n’est pas, comme on s’est empressé de le dire, le fait d’un détraqué ou d’un exalté solitaire, son caractère politique y imprime une marque d’origine. Il semble bien que, dans le premier moment, on l’ait pris pour un coup de la réaction ; d’autant plus qu’en même temps, il a couru d’étranges bruits sur l’arrestation à Munich ou aux alentours, sous un nom d’emprunt et presque sous un déguisement, du plus jeune des fils de l’Empereur déchu, le prince Joachim de Hohenzollern. Quoi