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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 51.djvu/355

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si petit compagnon de métier qui n’eût de son temps (1467) une longue robe de drap jusques au talon. »

Seulement, il y avait des robes pour toutes les bourses, à partir de 100 francs jusqu’à 250 pour les patrons, — « maîtres, » — charpentiers ou maçons, les employés civils ou militaires des châteaux et des villes, les petits propriétaires urbains ou ruraux ; il y en avait depuis 300 jusqu’à 1 000 francs et au-dessus pour tous ceux qui, chevaliers ou docteurs, marchands ou princes, étaient sans distinction de classes assez riches ou assez luxueux pour les payer. Il existe en effet au moyen âge, dans le sein de chaque profession et de chaque catégorie sociale, de grandes disparités : entre ouvriers, de 12 francs pour une tunique de bouvier (1251), à 130 francs pour l’habit d’un flotteur de bois ; entre gens d’église, de 36 francs pour une robe de prêtre (1496), à 500 francs pour la robe d’été du doyen de Tours ; entre gens de guerre, de. 60 francs pour la robe d’un artilleur, à 262 francs pour celle d’un trompette ; entre domestiques, de 31 francs pour la robe d’un portier de château (1346), à 214 francs pour un costume de serviteur du « valet de ville » à Orléans, — on sait que le « valet de ville » était le chef de la police municipale.

Et l’on pourrait relever, aux XVIIe et XVIIIe siècles, semblables écarts parmi les mêmes sortes de personnes : et par exemple entre le hoqueton à 460 francs des archers de la connétablie et l’habit d’un soldat garde-côtes à 28 francs, en Boulonais (1713), ou le sarrot des miliciens, en toile jaune avec parement et collet de toile bleu de roi, à 27 francs sous Louis XVe Ce dernier est exactement du même prix que le pourpoint d’arbalétrier en 1420 ; cependant l’habit du soldat, féodal ou monarchique, qu’il s’agît de la cotte-hardie d’un écuyer ou du hoqueton d’un franc-archer, revenait le plus souvent à une soixantaine de francs.

Le justaucorps, la veste et la culotte du fantassin de l’armée régulière, au XVIIIe siècle, absorbaient 4 mètres 50 de cadis gris-blanc, 2 mètres 10 de drap de Lodève et, pour la doublure, 6 mètres 60 de serge d’Aumale. Au cavalier l’État fournissait en nature l’étoffe du costume, ainsi que les armes et le cheval nu, et le capitaine, moyennant 90 francs par tête, devait pourvoir ses hommes de buffle, chapeau, bottes, sellé et menu harnachement ; ce qui lui coûtait en bloc plus du double de la somme allouée à cet effet.