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LE RḔNEMENT D'ALEXANDRE III
MISSION LABOULAYE
1866-1891

NOTES ET SOUVENIRS


I

Au printemps de 1886, Alexandre III boudait la République Française. Le rappel du général Appert était, nous l’avons dit[1], la cause de cette bouderie, assez peu justifiée d’ailleurs, à ne la considérer que dans ses origines, un gouvernement ayant toujours le droit de disposer de son personnel diplomatique. Ce rappel ne constituait pas un manquement aux usages ; mais, dans les circonstances où il s’était produit, il était singulièrement inopportun. Alexandre III s’en était offensé. Dans un accès de colère, il avait refusé de laisser accréditer un autre ambassadeur auprès de sa personne et déclaré que désormais un chargé d’affaires suffirait. Ordre donné au baron de Mohrenheim, son représentant en France, de quitter son poste et de sortir de France ; défense faite à ses ministres de l’entretenir de cet incident, à moins d’une nécessité absolue, telles étaient les conséquences de l’événement, et le moins qu’on pût y voir était un fléchissement des bonnes relations qui avaient existé jusque-là entre Paris et Saint-Pétersbourg.

Naturellement, l’Allemagne cherchait à envenimer le conflit. Ses journaux annonçaient avec une satisfaction à peine dissimulée que désormais la République n’aurait plus d’ambassadeur

  1. Voyez la Revue du 15 novembre 1918.