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LA « LIBRE BELGIQUE. »

l’actualité aux pages qui sortirent ainsi chaque semaine de la prison de Saint-Gilles.

Le jésuite et Fidelis échappèrent à la mort par miracle et furent condamnés à quinze ans de travaux forcés. À peine enfermé dans un camp de représailles de l’affreux bagne de Vilvorde, Fidelis cherche un truc pour continuer sa collaboration au cher petit journal. Cette fois le va-et-vient fut rétabli grâce à une vulgaire boîte de fraises dont les parois évidées reçurent de fines feuilles de papier couvertes de microscopiques écritures. C’était un lieutenant boche qui, sans le savoir, servait d’intermédiaire. Jusqu’au jour où les bolchevistes vinrent ouvrir les portes du bagne, le 11 novembre 1918, le condamné eut le bonheur de garder dans la Libre Belgique son poste de combat.

À Bruxelles, tandis que les révolutionnaires boches essayaient de déchaîner l’émeute, sans heureusement y parvenir, le Père Hébrant, toujours sur la brèche avec ses confrères les Pères Péters, Deharveng et d’autres, aidé par l’abbé van den Hout, préparait le sommaire du numéro de la Victoire. Fidelis avait écrit sur le coin d’une table, dans une maison amie, à Vilvorde, quelques instants après sa sortie du bagne, un dernier article pour le Roi.

Le jour où Albert Ier, à la tête de ses héroïques soldats et des troupes alliées, passa à travers un tonnerre ininterrompu d’acclamations pour se rendre au Parlement, le vaillant journal, tiré à 200 000 exemplaires, fut en quelques minutes distribué…

Toutes les mains se tendaient vers ce pauvre petit papier qui avait toujours et quand même soutenu le moral d’un peuple opprimé.

Il avait été à la peine, il était à l’honneur.

Sa tâche patriotique était faite.


Albert van de Kerckhove
(Fidelis)