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L’Autriche de François-Joseph était déjà une survivance d’un passé aboli[1] ; elle n’est plus aujourd’hui qu’un mauvais souvenir ; c’en est fini à jamais de son absolutisme centralisateur et germanisateur, de cet étrange et mortel anachronisme d’une politique d’expansion qui ne s’appuyait pas sur une nation, mais sur une dynastie et un Liai. La disparition de l’Autriche n’est pas une éclipse, comme il en est advenu à tous les grands peuples historiques, c’est un point final mis à une période de l’histoire européenne. L’Autriche nouvelle, indépendante, qui naîtra de la Conférence, ne ressuscitera pas, même s’il lui en prenait envie, l’ancienne politique autrichienne. Qu’on ne cherche donc plus à agiter cet épouvantail.

Un État autrichien de langue allemande, constitué avec les provinces de l’ancienne Cisleithanie qui n’appartenaient ni à l’ancien royaume de Bohème ni au domaine yougo-slave, sera un petit état alpestre et danubien qui ne comptera guère plus de six millions d’âmes se répartissant ainsi :


Basse-Autriche 3 130 536
Haute-Autriche 840 604
Salzbourg 208 009
Styrie (partie 983 252
Carinthie (partie) 304 287
Tyrol allemand 525 115
Vararlberg 126 743
Total 6 118 546[2]


Ces six millions d’hommes se décomposent en deux groupes presque égaux : la ville de Vienne d’une part, avec sa banlieue, qui comprend presque toute la Basse-Autriche et, de l’autre, une série de vallées alpestres, y compris celle du Danube, qui sont habitées par une population de langue allemande, mais très particulariste, et qui représente un germanisme fort éloigné du modèle prussianisé. La Haute-Autriche et Salzbourg, avec environ un million d’habitants, ont une population proche parente de celle de la Haute-Bavière. Les gens du Tyrol et du Vorarlberg sont des montagnards très anciennement

  1. Voyez notre article François-Joseph, dans la Revue du 1er janvier 1917, ou notre brochure : François-Joseph ; essai d’histoire psychotonique (Perrin, 1917.)
  2. Chiffres de 1910. Voyez A. Chervin : L’Autriche et la Hongrie de demain. Les différentes nationalités d’après les langues parlées (Berger-Levrault, 1915.)