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mortiers autrichiens en voyage pour le front. Enfin nos aviateurs ne comptent pas, à l’arrière des lignes ennemies, moins de vingt-trois escadrilles. Comme à Verdun, le commandement allemand a décidé de frapper un coup d’une brutalité inouïe : il a réuni tous les moyens pour faire vite et pour emporter le morceau.

En face de ces cinq divisions, deux françaises : la 154e (Breton) face au Sud, de Dranoutre au Petit Kemmel, barrant la vallée du Hellebeek, et la division Madelin, qui occupe le Kemmel et la, crête de Lindenhoeck, en liaison à gauche avec la 9e britannique. Nos deux autres divisions, plus à l’Est, la 34e (Savatier) devant le château de Locre et la 133e à notre extrême droite, sont en dehors du secteur d’attaque. La 39e (Massenet) est en cours de débarquement ; les cavaliers toujours en réserve sur les monts.

On est donc dans cette situation : deux troupes en présence, également combatives, également animées de l’esprit offensif, les Français décidés à faire lâcher prise aux Allemands, les Allemands résolus à forcer le passage et à monter sur le Kemmel. Les ordres des deux côtés étaient catégoriques. La crise ne pouvait plus tarder.

Comme il arrive dans ces cas-là, elle prit la forme d’une bataille de rencontre. Elle prélude, le 22 et le 23 avril, par de petites attaques au Nord de Bailleul, où les Allemands cherchent à s’assurer quelques avantages de position, afin d’améliorer leur base de départ. De notre côté, nous poursuivons énergiquement notre plan d’offensives partielles, de coups de main ayant pour but d’enlever à l’ennemi cette base de départ et de le rejeter dans la Douve. Ces petites opérations de sûreté sont tout à fait dans la manière de Foch qui, dans ses leçons, en a fait un des traits essentiels de sa méthode. Elles s’exécutent à peu de frais, par surprise, sur des points choisis, avec peu de monde à la fois. Il s’agit de gêner l’ennemi en s’emparant d’un point d’appui, de le harceler, de faire des prisonniers, d’obtenir des renseignements, de nous assurer d’un tremplin pour un nouveau bond. L’un de nos premiers objectifs était ce moulin de Spanbroeck, placé à ce point d’intersection dont j’ai montré l’importance, où le système du Kemmel vient se souder aux collines d’Ypres ; de là, on peut monter une nouvelle opération sur Wytschaete et couvrir ainsi solidement le saillant d’Ypres par le Sud.