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la suite, ces crimes d’ensemble, ces crimes nationaux, ces crimes de droit public, elle les a multipliés par une foule de crimes privés contre les biens et les personnes. Pillages, incendies, exécutions, dans l’intention avouée et expliquée de répandre la terreur comme une panique et de tirer de l’horreur même un instrument de domination. Ici le tableau se charge de couleur, ou plutôt le simple énoncé des faits l’en charge, par la seule force de la vérité, sans qu’il soit poussé trop au noir. « Ce sont les Allemands qui, les premiers, ont fait usage des gaz toxiques, malgré les épouvantables souffrances qui devaient en résulter. Ce sont eux qui ont pris l’initiative des bombardements par avions et des tirs à longue distance sur des villes, sans raison militaire, avec l’unique objet de diminuer le moral de leurs adversaires, en frappant les femmes et les enfants. Ce sont eux qui ont commencé la campagne sous-marine, défi de pirates au droit international, condamnant ainsi à la mort un grand nombre de passagers et de marins innocents, en plein Océan, loin de tout secours, à la merci des vents et des vagues, et, pis encore, à la merci des équipages de leurs sous-marins. Ce sont eux qui, avec une sauvagerie brutale, ont emmené en esclavage des milliers d’bommes et de femmes dans les pays étrangers. Ce sont eux qui ont permis, à l’égard des prisonniers de guerre qu’ils avaient faits, un traitement barbare devant lequel les peuples les moins civilisés auraient reculé. »

Puis ce raccourci lui-même est comme rassemblé en un trait, en une ligne : « La conduite de l’Allemagne est à peu près sans exemple dans l’histoire de l’Humanité. La terrible responsabilité qui pèse sur elle se résume dans le fait qu’au moins sept millions de morts gisent enterrés en Europe, tandis que plus de vingt millions de vivants témoignent, par leurs blessures et leurs souffrances, du fait que l’Allemagne a voulu, par la guerre, satisfaire sa passion pour la tyrannie. » Puisqu’il s’agit d’un jugement, de ces considérants découle logiquement, nécessairement, le dispositif : « Les Puissances alliées et associées pensent qu’elles manqueraient à ceux qui ont tout donné pour sauver la liberté du monde, si elles consentaient à ne pas voir dans cette guerre un crime contre l’humanité et contre le droit... Donc la justice est la seule base possible pour le règlement des comptes de cette terrible guerre. La justice est ce que la Délégation allemande demande et ce que cette Délégation déclare qu’on a promis à l’Allemagne. La justice, l’Allemagne l’aura. » (Vraiment, ne reconnaît-on pas dans cette phrase rapide, lancée comme un coup