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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/532

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tel geste aurait été considérable, s’il avait répondu à un mouvement populaire puissant et coordonné qui se serait produit au Nord, au Sud, à l’Est et à l’Ouest (que de points cardinaux I) Mais, il fait défaut aujourd’hui, comme il a fait défaut au cours de toute l’histoire allemande. »

Tel est l’avis de l’Allemagne sur l’unité allemande.


Comment on a traité les particularismes. — L’armistice a été conclu sur des données insuffisantes : la paix aussi, je le crains. Nous avons supposé que l’Allemagne d’hier était une personne vivante et consciente de sa vie selon la leçon enseignée par les professeurs allemands et semée par eux dans l’Univers. L’Allemagne conçue et mise sur pied par Bismarck est-elle réellement cet organisme intangible ? Le type est-il fixé ? Ne se modifiera-t-il plus ? Sous la pression des circonstances et des nécessités ambiantes, ne retournerait-il pas à sa nature primitive ?

Sans avoir la prétention de lire dans l’avenir ni dans les cœurs, une observation de simple bon sens peut servir à nous éclairer.

Rien ne réussissant comme le succès, la thèse de l’unité bismarckienne a été en faveur, auprès du peuple allemand, tant qu’elle lui apportait la victoire, la prospérité et la joie. Logiquement, elle doit perdre cette faveur, maintenant qu’il est démontré que ce même système, poussant, par l’extension du militarisme, à la haine et à la guerre universelles, met l’Allemagne au ban des peuples et la condamne à la honte, à la défaite et à la ruine. On s’attachait à l’Empire glorieux et prospère. A l’Empire battu, c’est autre chose.

Déjà cette tendance à la désaffection et au revirement se produit. Sans insister et pour rappeler simplement l’argument qui paraît toucher au cœur le peuple allemand, je citerai ces quelques lignes de la Münchener Post : « Quand le peuple saura tout cela, il comprendra enfin pourquoi les vainqueurs sont si durs et si impitoyables. Il fera taire tous ceux qui s’étonnent de la rigueur des conditions de paix ; il leur imposera à tous un ton plus modeste et, dans sa sensibilité morale, ce sera cela qui le ramènera dans la voie des bons sentiments et du travail, sur cette voie qu’il suivit avant le règne de la politique de violence. »