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le gouvernement britannique qui, avant la guerre, avait à peine en Egypte 4 000 hommes de troupes anglaises, dut en amener en hâte 40 000 ; une délégation égyptienne est venue à Paris avec mission d’exposer à la Conférence les doléances de l’Egypte, mais jusqu’ici elle n’a pas été entendue ; le système de centralisation et d’administration anglaise de lord Cromer est d’ores et déjà condamné. Lord Milner se rend en Egypte pour étudier les causes du mécontentement et les remèdes. C’est à ce prix seulement qu’une tranquillité relative a pu être rétablie. L’attaque contre les Arméniens qui, au Caire, ne forment qu’une colonie peu nombreuse et en général pauvre, est révélatrice ; c’est la signature du comité jeune-turc. Les fauteurs du désordre ont profité des circonstances locales et des motifs indigènes de mécontentement ; ils ont cherché à agiter la jeunesse universitaire au nom des intérêts de l’Islam ; mais leur véritable dessein était de manifester en faveur de l’intégrité de l’Empire ottoman et des Jeunes-Turcs ; les incidents d’Egypte se lient directement aux troubles de l’Inde, de Syrie, du Kurdistan.

Dans la grande péninsule indoue, les troubles commencèrent au mois d’avril ; des orateurs populaires excitent les musulmans à la révolte et parlent dans leurs discours des émeutes d’Egypte ; ils invoquent l’exemple des bolchevistes de Russie. Du 10 au 15 avril, des troubles graves éclatent à Amritsar, Lahore, Bombay, Ahmedabad ; tout le Punjab est en rébellion ; à Calcutta, le 15, il y a douze tués ou blessés ; les musulmans cherchent à entraîner les Indous, mais ils n’y réussissent que dans une faible mesure ; les émeutiers parlent du droit de libre disposition ; aussi, ce sont des agents turcs que l’on signale à la tête du mouvement ; ils répandent de fausses rumeurs dans la masse ignorante ; mais les princes indous et les hauts per- sonnages, sans distinction de religion, secondent loyalement le gouvernement anglais et s’emploient à rétablir le calme. Dans les premiers jours de mai, l’ordre renaît peu à peu ; mais le 9 mai, survient une complication ; l’émir d’Afghanistan, Amanullah Khan, successeur de l’émir Habibullah, assassiné, selon toute vraisemblance, à l’instigation des agents turco-allemands, réclame l’indépendance complète de son pays et lance des bandes armées au delà de la frontière des Indes ; le gouvernement est obligé d’appeler en hâte des troupes qui prennent l’offensive