l’intérieur des terres, remontant les vallées fertiles, poussant leurs troupeaux vers les hauts plateaux. Grâce à leur organisation sociale, familiale, religieuse et communale très forte, ils ont peu à peu repoussé ou submergé le paysan turc que les levées d’hommes pour les guerres du Sultan ne cessaient de décimer ; jusqu’à 50 kilomètres, et même sur certains points, par exemple dans la vallée du Méandre, jusqu’à plus de 100 kilomètres, ils l’emportent et l’emporteront de plus en plus sur les Turcs. Le caza (district) de Smyrne, sur 416 000 habitants comprenait, avant la guerre, 96 000 Turcs, 243 000 Grecs, 8 000 Arméniens, 16 000 Juifs et .52 000 étrangers. Pour le sandjak (département) de Smyrne tout entier, la proportion était de 219 000 Turcs contre 449 000 Grecs. Le sandjak de Magnésie, qui ne touche pas à la mer, compte encore 83 000 Grecs contre 247 000 Turcs. Les Grecs revendiquent toute cette région et en demandent l’annexion immédiate. Il paraîtra sans doute plus prudent et plus équitable de maintenir l’unité de l’Anatolie sous la souveraineté du Sultan, mais de confier à la Grèce un mandat de la Société des Nations pour toute la région où les Hellènes sont nombreux, ce qui équivaudrait à peu près au vilayet d’Aïdin.
Entre la région côtière fortement hellénisée et les montagnes du Taurus et de l’Anti-Taurus, d’une part, et, d’autre part, d’une mer à l’autre, s’étendent les hauts plateaux de l’Anatolie. C’est une région très peu peuplée, mais qui, au moins dans certaines de ses parties, est susceptible de colonisation agricole ; on y trouve des mines, dont les Allemands avaient soigneusement fait la prospection ; le climat est sain. Ce pays a jadis connu une prospérité que les invasions turques suivies du régime politique ottoman, ont détruite. Les Turcs auront toute liberté d’y vivre et de s’y adapter peu à peu à la civilisation ; mais ils sont trop peu nombreux et trop apathiques pour mettre en valeur ces vastes contrées ; elles ont besoin d’une colonisation européenne. Les Italiens, qui ont peu de colonies et de nombreux émigrants, qui sont sobres, tenaces, prolifiques, bons agriculteurs, habitués au climat et aux cultures méditerranéennes, y trouveraient un champ d’expansion parfaitement adapté à leurs facultés : si la Société des Nations leur en donnait le mandat, ils trouveraient là le meilleur emploi de leur activité, car ils ont peu de capitaux et beaucoup