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plaisir qu’on en jouisse ; mais à la condition de ne pas oublier tout ce que peut envelopper tant de rondeur.

Il n’y a pas de doute : le mouvement autrichien est émané d’abord du parti socialiste. Les premiers, dès le 3 octobre 1918, les représentants ou les délégués des travailleurs allemands d’Autriche, ont réclamé « la réunion de tous les territoires allemands d’Autriche en un État de l’Autriche allemande qui réglera d’après ses besoins ses rapports avec les autres nationalités d’Autriche et avec l’Empire allemand. » La seconde, dès le 15 octobre, l’Arbeiter Zeitung écrivait : « Nous ne resterons pas isolés, si les autres peuples de la Monarchie ne veulent pas de commerce avec nous ; par delà la frontière demeurent 60 millions d’Allemands. Ne courons donc pas après les autres peuples. » Troisièmement, le 21, à la séance d’ouverture de l’Assemblée nationale provisoire, après que le président Waldner eut adressé un « salut à l’Autriche allemande, » Victor Adler en personne prôna une association des peuples, un Volkerbund, avec les États voisins, s’ils le veulent bien. S’ils se dérobent, s’ils posent des conditions incompatibles avec la dignité du peuple allemand d’Autriche, celui-ci se verra contraint de s’annexer comme État fédéral particulier (Sonderbundesstaat) à l’Empire allemand. « Nous réclamons, s’écriait Adler, pour l’État de l’Autriche allemande la pleine liberté d’opter entre ces deux éventualités. »

Cependant, à la fin d’octobre, l’État de l’Autriche allemande s’organise. L’Assemblée nationale provisoire s’arroge le pouvoir suprême. Elle confie « le pouvoir gouvernemental et exécutif » à un Comité pris dans son sein, qui portera le titre de Conseil d’État de l’Autriche allemande. Elle crée un Chancelier d’État et quatorze secrétariats d’État correspondant aux anciens ministères. Dans cette ébauche de constitution, elle arrange tout, combine tout, mais ne définit pas « le caractère » de l’État, On propose seulement que ce soit un État libre (Freistaat), libre même d’aliéner sa liberté.

Le 11 novembre, l’Empereur abdique, et, le 12, la République est proclamée. Le Statut improvisé porte, en son article 2 : « L’Autriche allemande forme une portion intégrante de la République allemande. Des lois particulières régleront la participation de l’Autriche allemande à la législation et à l’administration de la République d’Allemagne, de même que l’extension de la juridiction, des lois et des institutions de la République d’Allemagne à la République de l’Autriche allemande. » Le Président de l’Assemblée Dinghoffer ne contint pas son enthousiasme : « Unie à la grande République