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allemande, s’écria-t-il, l’Autriche allemande sera un foyer des véritables droits de l’homme et de développement pacifique. » Le Président de la République. Seitz, se tut, du moins ce jour-là, et comme lui, le message annonçant l’avènement du nouveau régime, ne prononça pas le nom de l’Allemagne. Mais les guides, les coryphées, Victor Adler, qui avait été le premier ministre des Affaires étrangères de la République autrichienne, Otto Bauer, qui lui avait succédé au Ballplatz, non seulement par instinct de race, comme on l’a dit, mais pour les besoins de leur propagande, ont prêché le rattachement au Reich. Et qui était l’auteur du Statut du 12 novembre ? Ni plus ni moins que le chancelier Renner.

A ses hernies aussi, l’estomac gronde. « On se demande, dit un observateur, si le gouvernement de Vienne ne joue pas un double jeu, qu’on pourrait définir ainsi : le cœur à l’Allemagne, l’estomac à l’Entente. » Si de grands sentiments rapprochent l’Autriche de l’Empire allemand, un grand appétit l’en éloigne. Sans doute, on serait heureux de reprendre ; sur cette nouvelle base de l’union, le beau projet de Mittel-Europa. Mais il faut vivre ; pour vivre, il faut manger ; et, pour manger, il faut avoir de quoi. Le premier trimestre de 1919 s’écoula en démarches contradictoires. Le 9 janvier, l’Assemblée nationale de Vienne discutait une disposition qui accordait, par réciprocité, aux citoyens de la République allemande le droit de vote pour la constitution autrichienne. Un des orateurs déclara : « Le Conseil d’État s’en tient jusqu’aujourd’hui et s’en tiendra dans l’avenir à ce point de vue que la République de l’Autriche allemande fait partie de la grande République allemande ; » — et ce fut le chancelier Renner.

Les socialistes se flattaient qu’aux élections du 19 janvier, d’où était sortie « l’Allemagne rouge, répondaient celles du 16 février, d’où sortirait, parallèlement, ou mieux concentriquement, si les parallèles ne se rencontrent pas, « l’Autriche rouge. » Le jour de l’inauguration de l’Assemblée allemande de Weimar, le président de l’Assemblée autrichienne Dinghoffer, en manière d’hommage, déplora que « Les circonstances ne permissent pas encore la participation des Autrichiens aux travaux de cette Assemblée. Mais, assura-t-il, l’union est prochaine avec la vieille Mère-Patrie, et pour toujours. »

Tandis qu’en Allemagne l’ancien vice-chancelier von Payer mettait en relief les avantages de l’union et que Noske, pour la rendre plus aisée, conseillait de ne pas « liarder, » de ne pas « compter les pfennigs, » à Vienne, le chancelier Renner traitait Ébert de « notre