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impressionnerait profondément l’opinion publique, provoquerait l’évacuation de la capitale menacée d’un bombardement, troublerait sans doute l’action gouvernementale indispensable à la conduite de la guerre. C’était donc Paris et Abbeville qu’il fallait couvrir avant tout ; c’était dans les deux directions qu’il fallait, et à tout prix, au plus tôt arrêter l’avance de l’ennemi. Sur tout le front de Lens à Château-Thierry et même au delà, force était de préparer la défense pied à pied ; les organisations défensives devaient être poussées avec la plus grande célérité, les positions de batteries bien établies, les instructions aux corps chargés de tenir la première et la deuxième position ou de contre-attaquer données d’une façon nette et précise, les troupes entraînées par de fréquents exercices d’alerte ; le commandement devait se tenir prêt à agir directement avec énergie pour assurer dès qu’il le pourrait sur le terrain la conduite de la bataille. On devait se préparer à parer aux diversions de l’ennemi en Flandre comme en Champagne ; c’était cependant en vue des attaques en direction d’Abbeville et de Paris que devait être réalisée ou prévue la réunion la plus rapide des réserves. « Les réserves alliées iront à la bataille là où elle se livrera, ajoutait le général en chef, les réserves françaises s’engageant au profit de l’armée britannique si celle-ci est fortement attaquée, et, de même, les réserves anglaises au profit des armées françaises, si l’ennemi concentre décidément ses masses dans la direction de Paris. »

Par ailleurs, il s’agissait de donner au commandement le procédé de parade qui paraîtrait décidément propre à répondre au procédé d’attaque maintenant éventé de l’ennemi. Après avoir pièce par pièce démonté la méthode d’attaque brusquée dans les termes que j’ai cités au début de cette étude [1], le général en chef prescrivait d’éventer la surprise par la recherche acharnée du renseignement et de faire trébucher l’attaque, préalablement démasquée, par l’occupation solide de la seconde ligne dès le début de l’action. « Mieux vaut envoyer des effectifs à temps, c’est-à-dire avant l’attaque, que d’en envoyer davantage plus tard. » Si l’ennemi est parvenu à pénétrer assez profondément pour faire brèche, le commandement s’appliquera avant tout à « endiguer l’ennemi sur les flancs de

  1. Voyez la Revue du 15 août 1919, p. 815-816.