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grosse partie. Il savait, dès le 18, que le kronprinz Ruprecht de Bavière n’attaquerait plus et qu’on allait même lui prendre des divisions au profit des armées allemandes combattant sur le front à l’Est de Paris ; il ne croyait plus à une attaque sur le front britannique ; quand on lui avait parlé d’indices d’attaque en Flandre, il avait simplement prescrit au gouverneur de Dunkerque de relever ses inondations, mais à Haig réclamant son 22e corps, il avait répondu que la bataille engagée sur un front de 130 kilomètres entre l’Aisne et l’Argonne supprimait toute crainte d’offensive sérieuse au Nord de l’Oise ; il poussait le maréchal à déclencher une attaque sur le flanc de la poche de la Lys et déjà, le 20, il allait plus loin ; au point où l’on en était, « il était indispensable de saisir l’ennemi et de l’attaquer partout où on pouvait le faire avec avantage. »

Le 21 juillet, il revenait à la bataille engagée : à ses lieutenants il adressait une directive générale concernant les opérations à poursuivre : il fallait pousser l’action de la 10e armée sur les plateaux au Nord de Fère en Tardenois en lui affectant toutes les ressources disponibles, organiser une parade éventuelle à la riposte que l’ennemi pourrait tenter au Nord de l’Oise ou sur le front britannique, en regroupant en arrière de la gauche et du centre du groupe d’armées Fayolle les divisions fatiguées, retirées de la bataille.

Ce même jour, il avait reçu à son Quartier-Général de Bombon, le général Pershing qui lui avait fait part de la situation des forces américaines ; elles pouvaient constituer avec les divisions entraînées une première armée qui recevrait un secteur du front en attendant qu’elle entreprit — et cela ne tarderait pas, — une grosse opération à l’Est de l’Argonne. Enfin le 24, Haig, Pétain et Pershing s’étant réunis chez Foch, celui-ci avait soumis à leur examen les projets d’opérations qui, la bataille de la Marne-Aisne une fois close, ne permettraient pas à l’ennemi battu de se ressaisir. Nous parlerons sous peu et longuement de ces projets du 24 juillet, si vite mis à exécution. Il était intéressant de constater dès maintenant qu’ils s’édifiaient, — embrassant tout le champ de bataille de France, — à l’heure où l’Allemand défendait encore opiniâtrement les flancs de ses armées entre Marne et Aisne. Mais « il ne s’agissait » point de s’arrêter aux incidents du jour, il les fallait précéder, afin d’être maître de faire l’événement du lendemain.