Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 53.djvu/372

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

toute exécution, mais on était demeuré d’accord sur une visite que les principaux conjurés devaient faire à l’École militaire « dont il avait été résolu qu’il fallait être maître [1]. » Les conjurés s’y rendirent au milieu du jour ; ils se présentèrent d’un air tout naturel, et comme pour une simple visite. Ils furent introduits partout par des officiers républicains, « sondés à l’avance et qui donnaient des garanties d’honneur et d’attachement à la liberté. La visite des conjurés fut une revue complète, faite avec la plus grande tranquillité, du matériel comme du personnel de l’Ecole militaire. A un signal convenu, tout ce qui s’y trouvait pourrait être facilement livré et rais à la disposition des Hommes Libres. »

Une dernière réunion eut lieu le 29 mai pour reprendre les affaires au point où on les avait laissées sur la crainte de Guillaume. L’on prononça des discours et l’on convint, au cas d’arrestation, de réponses uniformément négatives ou dilatoires, qui devaient, par leur audace stoïque, interloquer la police impériale.


LES ARRESTATIONS

On arriva ainsi aux premiers jours de juin sans que le complot annoncé pour le 29 mai eût éclaté, L’Empereur en avait été vaguement informé depuis un mois : la police, celle du ministère, comme celle de la préfecture, avait des soupçons, mais qui se tournaient sur les officiers réformés. Sur l’avis qui lui était donné par le préfet de Police, Desmarest, chef de division au ministère, répondait : « J’ai l’honneur de remercier Monsieur le préfet de Police de l’avis qu’il veut bien me donner, et j’en fais part à Son Excellence, qui recherche aussi quelques faits relatifs à des militaires réformés. J’ai rencontré, il y a trois jours, l’ex général Malet sur le quai Voltaire ; il était avec trois autres personnes. C’est un homme que je regarde comme très mal disposé, et porté à de mauvais desseins. »

Le préfet de Police n’est donc pas surpris lorsqu’il reçoit,

  1. D’une lettre adressée le 4 mai 1819 par Gindre à Lemare où il retrace ce qu’il se rappelle de toute l’affaire, il écrit : « Tu me demandes encore quel jours en revenant de Passy, allâmes-nous à l’École militaire, et combien nous étions ? Ma foi, mon cher, je ne m’en rappelle guère. Je crois que c’était les premiers jours de juin ou les derniers de mai. Il y avait avec nous, je crois, Malet, Bazin, et si je ne me trompe, Demaillot, et je ne me remets pas des autres. »