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qu’il ne serait pas étonnant qu’il se lançât dans de fausses démarches et qu’il finît par se trouver compromis.

« Je sais gré au préfet de police de suivre vivement cette affaire. Vous me dites que cela n’est pas dangereux. D’accord. Mais dois-je donc m’attendre à ce que les personnes pour lesquelles j’ai témoigné le plus d’égards, soient les premières à ébranler la fidélité que me doit la Nation ? Quels qu’ils soient, ils n’y réussiront pas : et ils n’entraîneront que leur ruine.

« Au reste, quand il sera prouvé qu’ils sont coupables, je ne veux pas exercer d’autre vengeance que celle de les faire connaître à la Nation pour les marquer du sceau d’un éternel opprobre. On ne peut pas regarder comme des conversations philosophiques, ces conversations avec des hommes tarés, aussi peu philosophes que Malet, Guillet et autres généraux, tous gens d’exécution. Ce n’est plus de l’idéologie, mais une véritable conspiration. »

Napoléon a senti, sans que Dubois le lui ait écrit, qu’un seul des individus arrêtés a pu avoir des relations avec les idéologues du Sénat, et que c’est Jacquemont : mais c’est justement Jacquemont que Fouché prend sous sa protection, car il lui est spécialement recommandé par les hommes auxquels il a déjà des obligations et desquels il attend beaucoup. Aussi cabale-t-il contre le préfet de Police qui a osé toucher à un personnage aussi notable.

Le 16 juin, le préfet de Police écrit à l’Empereur : « Sire, j’ai l’honneur de transmettre à Votre Majesté la copie du dernier interrogatoire du sieur Demaillot qui, après avoir obstinément nié tous les faits, lors des premiers interrogatoires, a fini par en avouer la majeure partie. J’ai la certitude que le général Malet et ses affidés se réunissaient rue de Thionville à l’Athénée des jeunes élèves, et ce qui le prouverait même, c’est que le sieur Lemare, ancien président du département du Jura, et sa femme, propriétaires de cet établissement, ont disparu aussitôt qu’ils ont su l’arrestation du général Malet, du sieur Corneille, l’un des coryphées du parti, et que, malgré mes recherches, il m’a été impossible de les trouver. »

Ceci n’est qu’une entrée en matière, et voici l’essentiel : « Je suis instruit. Sire, que l’on m’accuse d’avoir fait arrêter très légèrement le sieur Jacquemont, ancien tribun et chef du bureau des sciences au ministère de l’Intérieur ; mais j’espère,