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ingénieuse, moins défiante qu’en quelques provinces de France les nouveautés techniques ; dès avant la guerre, on connaissait en Algérie des terres à blé travaillées comme celles du Manitoba canadien, des orangeraies qui ne l’eussent point cédé aux meilleures de Californie ; tel éleveur de bœufs de Guelma méritait l’hommage des estancieros les plus réputés de l’Argentine. La terre ne manque pas pour amplifier ces expériences.

A l’origine des cultures nord-africaines, les experts recommandent de placer des fourrages : « si tu veux du blé, fais du pré, » dit un de nos vieux proverbes paysans. La chaleur et la sécheresse des étés déterminent dans l’Afrique du Nord les conditions particulières de la croissance des prairies, naturelles ou artificielles. L’élevage indigène, à peu près limité au petit bétail, reposait sur le principe de la transhumance qui correspond à une économie tout à fait routinière. Aujourd’hui dans la région littorale du Tell tunisien et algérien, ainsi que dans les plaines du Maroc atlantique, les troupeaux sont stables, des comités formés ou dirigés par les colons français enseignent aux indigènes des cultures fourragères adaptées au climat, céréales secondaires ou légumineuses, construisent pour le bétail des abris contre la pluie et le soleil, mettent des fourrages en réserve par ensilage pour les semaines critiques de la canicule. Aussi l’élevage nord-africain s’est-il beaucoup amélioré ; on en a la preuve par les concours agricoles maintenant très suivis par les indigènes eux-mêmes.

Le troupeau bovin, sauf peut-être dans la Chaouïa et la Doukkala marocaines, n’offre toutefois pas encore des effectifs suffisants pour un large commerce d’exportation ; c’est beaucoup déjà qu’il suffise à la consommation locale, qui est en hausse rapide ; il contribue aussi à stabiliser les rendements généraux de l’agriculture en assurant une bonne fumure du sol ; il est surtout développé dans les régions de mixed farming, dans la vallée tunisienne de la Medjerda, où M. Jules Saurin fut le tenace propagateur d’une installation de familles rurales françaises, sur les collines au relief varié du Tell constantinois, etc. Mais l’élevage caractéristique de l’Afrique du Nord reste celui de la chèvre et plus encore du mouton ; ces animaux sont très rustiques, il est relativement facile d’en amender des races par sélection et croisement ; on est arrivé à fixer des types recommandables à la fois pour la viande, qui seule intéressait