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un phénomène analogue se produit, avec la même particularité d’un succès imprévu des femmes dans l’enseignement des sciences. Sur un palier plus humble de la pédagogie, il s’ouvre chez nous une école de gouvernantes dont l’objet est la substitution, dans les familles, de jeunes filles françaises aux étrangères autrefois à la mode. — La profession d’infirmière a reçu de la guerre un prestige qu’elle n’avait pas, en France du moins. Tandis que, dans les pays de langue anglaise et dans les pays scandinaves, les familles les mieux posées s’honoraient d’avoir une fille garde-malade, pour des raisons diverses, il était bien loin d’en être ainsi chez nous. La profession était mal recrutée, et peu considérée, plutôt même que mal rétribuée. Or on paie, surtout en France, avec des égards autant qu’avec de l’argent. Des tentatives avaient été faites, avant la guerre, par Mme Alphen-Salvador, par Mlle Chaptal à Paris, par Mlle Hamilton et le docteur Lande à Bordeaux Des écoles avaient été ouvertes. La guerre a fait ce qu’un siècle d’efforts dans le même sens n’eût pas fait. Elle a promu en dignité le rôle de l’infirmière, et confondu les professionnelles dans la reconnaissance publique qui s’attachait à celles qui ne l’étaient point. L’opinion se préoccupe maintenant d’organiser par des études régularisées, par un diplôme d’Etat, par des perspectives d’avenir une profession jusqu’ici mal classée L’infirmière pourrait en effet, par voie d’avancement, devenir dame visiteuse, inspectrice scolaire ; elle participerait à l’administration hospitalière, au moins comme directrice d’orphelinats et de crèches. Il semble, à n’en pas douter, que les femmes aient leur place marquée dans l’hygiène sociale de demain.

A la campagne, dans toute exploitation agricole modeste, la femme a eu de tout temps sa besogne à elle, même quand l’homme était présent ; on dit la « maîtresse, » dans beaucoup de nos contrées, comme on dit « le maître. » Il s’agit maintenant de lui attribuer un rôle même dans une exploitation plus importante. Une ferme-école a été créée pour l’éducation agricole féminine, en Seine-et-Oise, en pleine forêt, dans un domaine appartenant à M. et Mme George Chiris ; et, dans cette « ferme française, » on apprend les travaux des champs sans désapprendre les délicatesses reçues d’une autre éducation. Toute grande ferme n’est-elle pas en un sens un immense ménage ? et cela est du ressort de la femme. Puis il y a les exploitations