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de notre avance et avait été accompagnée d’une dépression constante du moral des troupes allemandes. Les garnisons laissées en arrière-gardes pour contenir notre avance aux points importants s’étaient rendues dès qu’elles avaient été menacées d’être coupées. Les nécessités urgentes du moment, le large développement du front d’attaque, l’incertitude qui en résultait sur le point d’attaque ultérieur et l’étendue de ses pertes avaient forcé l’ennemi à engager ses réserves par petits paquets, à mesure qu’elles arrivaient sur le front... Dans de pareilles conditions, un coup soudain et heureux en force, suffisant pour faire sauter la charnière des organisations où l’ennemi pensait se retirer, devait produire des résultats de grande importance. »

Dès le 27, le Commandant en chef des armées britanniques, soumettant au maréchal Foch un projet d’utilisation des divisions américaines, envisageait nettement comme bientôt réalisable « un mouvement concentrique sur Cambrai-Saint-Quentin et, en partant du Sud, sur Mézières. » Nous savons qu’il se rencontrait là, — tant la communion de vues était parfaite,— avec un projet dès longtemps arrêté dans l’esprit de Foch. « Les objectifs finaux que vous m’indiquez, lui répondait celui-ci, sont bien ceux que j’envisage de mon côté et vers lesquels je fais tendre les actions des armées alliées. Ces actions sont actuellement montées dans différentes régions suivant un certain style pour chacune. Il n’y a donc qu’à les faire se développer avec le plus d’activité possible. C’est à quoi je m’applique. »

Le fait est que Foch ne perdait pas un instant de vue l’échiquier où, tous les jours davantage, il entendait faire manœuvrer, comme autant de pions, les quatorze armées placées sous son commandement suprême. Nous connaissons le Mémoire où, dès le 24 juillet, s’étaient révélés ses premiers projets d’offensive. Il en poursuivait la réalisation, élargissant, sinon sa pensée qui avait toujours été vaste, du moins ses plans, à mesure que se succédaient les victoires. Déjà la simple bataille entre Amiens et Montdidier était devenue bataille entre Ancre et Oise, puis bataille entre Arras et Soissons ; et maintenant, il étudiait une extension plus forte encore des opérations : les pensées qui l’agitaient se trahissaient en une lettre à Pershing du 23 août : « S’étendant de la Scarpe à la Champagne, la