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du cœur comme de la bouche. Nous avons ici le témoignage le plus caractéristique peut être des illusions unitaires et de la sujétion voulue du XVIIe siècle.

Tout cela n’était pas pour déplaire à Louis XIV qui, à cette date, devenait maître. Il a subi les impressions, reçu les conseils de Mazarin. Il a les mêmes défiances, les mêmes horreurs que lui de toute secte capable de former faction. Il suit donc la même voie. Mais avec lui, la manière devient plus forte. Le 15 avril 1664, c’est dans des Lettres patentes en forme d’Édit que le Roi « autorisait, » prenait à son compte tout ce qu’avaient décidé les Papes Innocent X et Alexandre VII contre le Jansénisme, tout ce qu’avait fait, en conformité, le haut Clergé. La signature du formulaire était derechef prescrite. Avec quelles précisions, quelles sanctions juridiques et pénalités réelles contre les délinquants, qu’on en juge :

« ... En cas de refus par aucuns ecclésiastiques... de souscrire ledit Formulaire, (le Roi) veut qu’il soit procédé contre eux par les Evêques... suivant les constitutions canoniques et les lois de son royaume, comme aussi nonobstant toutes appellations simples ou comme d’abus... Veut en outre qu’à faute d’avoir, lesdits ecclésiastiques... pourvus de bénéfices, souscrit ledit Formulaire un mois après la publication..., les bénéfices, dignités, offices... dont ils sont pourvus ou auxquels ils prétendent droit, demeurent vacants et impénétrables de plein droit, sans qu’il soit besoin d’aucune sentence ni déclaration judiciaire et sans qu’ils (y) puissent être rétablis, encore qu’ils voudraient postérieurement signer ledit Formulaire... Enjoint aux collateurs ordinaires d’y pourvoir incontinent après ledit mois, jusqu’à ce qu’il y ait été pourvu. Veut que les fruits desdits bénéfices soient saisis à la requête des procureurs généraux ou de leurs substituts, et employés au profit des hôpitaux des lieux.

Il y avait plus. Nul ne pourrait à l’avenir être pourvu quelque bénéfice que ce fût, — qu’il s’agit d’un prélat ou d’un sous-diacre, qu’il s’agit d’évêques ou d’abbés nommés soit par le Roi, soit par quelque patron ecclésiastique ou laïc ; — nul ne pourrait « prendre aucun degré dans les Universités, » ou exercer « quelques charges, principautés ou régences en icelles ou dans les collèges en dépendant ; » — nul ne pourrait, jusques au sein des monastères, exercer quelque charge, et même y être « reçu à profession, » s’il ne souscrivait le Formulaire.