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à en faire autant. Sa prévoyance leur fournissait d’ailleurs un mandement tout dressé qu’ils n’avaient plus qu’à contresigner et à publier dans leur diocèse. Et cela, c’était un premier « formulaire,’ — à l’usage des évêques. — Ces prélats étaient trop soucieux de leur dignité et de leurs privilèges, quelle que fût d’ailleurs leur couleur théologique, pour ne pas regimber. Ils reçurent la Bulle, mais, pour la plupart, ils jetèrent au panier le mandement suggéré.

Cependant, les Jansénistes persistaient, saisissaient de leur cause le grand public... L’année suivante, Mazarin revient sur eux. Mais un nouveau « conventicule » d’évêques présents à Paris, réunis au Louvre (pas plus d’une quarantaine encore), ne réussit pas mieux à faire marcher en accord les chefs des diocèses ni à faire taire les théologiens mutins.

En 1655, troisième effort, par la même procédure indirecte, dont vous voyez le motif : Mazarin désirait finir les choses en dehors du Pape, en France, en famille gallicane, et là même, ne point déclencher une action trop solennelle, ne rien faire qui menât au Concile national, l’épouvantait toujours, on le sait, de la monarchie très chrétienne.— Sans même attendre l’Assemblée générale du Clergé, pourtant prochaine, le Cardinal lit décider par une troisième assemblée formée de quinze prélats seulement, une nouvelle expédition aux évêques de France des documents émanant du Saint-Siège, bulles ou brefs, relatifs aux « Cinq propositions » de l’Augustinus, auxquels était joint un formulaire de foi qu’ils auraient à faire souscrire par tous les Chapitres, les recteurs d’Universités et les communautés, tant séculières que régulières, par les curés, les bénéficiaires, « et généralement par toutes les personnes qui sont sous leur charge, de quelque qualité et condition qu’elles fussent. » Il y avait alors, nous l’avons vu, dans la nation un élan d’obéissance, un entraînement de bonne volonté patriotique disciplinée : Mazarin le flaire et en profite. Les Assemblées générales du Clergé de 1656, de 1657, et de 1661 consentirent à toutes ces décisions, les confirmèrent, demandèrent avec le Roi au Pape Alexandre VI de confirmer de son côté la Bulle d’Innocent X. L’Assemblée de 1661 enfin rédige elle-même un formulaire nouveau. Ce fut ici un de ces moments, rares, je crois, en notre histoire, où il plut à l’individualisme français, intimidé ou enjôlé, de s’imposer spontanément l’obéissance de l’esprit et