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d’Ypres était, dès le 10 au soir, sérieusement menacé à sa droite [1].

Le premier effet de cette attaque — celui qu’avant tous autres, en attendait l’assaillant — fut de provoquer immédiatement chez le maréchal Haig la résolution de renoncer à toute offensive sur la Somme. Il en avertit incontinent le général Foch. Celui-ci, qui persistait obstinément à voir, tout au contraire, dans une offensive résolue le seul dérivatif possible à celle de l’ennemi, invita Pétain à tenir bon, malgré ce changement de plan, dans le projet d’attaque sur la ligne Moreuil-Demuin par l’armée Debeney. Quant à Haig, il était invité à se cramponner tout au moins à son front de Flandre : « Il restait bien entendu que le maintien absolu du front actuel des Flandres s’imposait autant que dans la région d’Arras, toute évacuation volontaire, telle que celle de la crête de Paschendaele, ne pouvant être interprétée par l’ennemi que comme un signe de faiblesse et comme une incitation à l’offensive. » L’ennemi devait être contenu sur sa ligne de combat avec les troupes engagées strictement nécessaires et arrêté définitivement sur la ligne hauteurs de Kemmel, Neuve-Église, pont de Nieppe, cours de la Clarence, hauteurs Mont Bernenchon et de Hinges, qui devait être organisée d’avance et occupée par des troupes de réserve.

Haig espérait bien tenir et mettait en mouvement ses renforts. De son côté, Foch, qui ne s’est jamais contenté de donner de bons conseils, ordonnait qu’on poussât au Nord de la Somme la 10e armée française Maistre et sur la ligne Beauvais-Breteuil la 5e armée Micheler, afin qu’une intervention put être promptement organisée sur le front britannique. Après accord avec Haig, les têtes de colonnes de Maistre étaient immédiatement poussées sur la Somme, de Picquigny à Amiens.

Cependant la poche creusée au Sud d’Ypres s’accentuait encore : le 11 avril, de nouvelles attaques refoulaient nos alliés vers Loisne, Merville, Neuf-Berquin et Doulieu. Se portant le long de la rive Nord du canal de la Lys, des détachements allemands pénétrèrent dans Merville. Un trou s’était produit au Sud-Ouest de Bailleul ; l’État-major britannique y jeta un groupement

  1. Pour le détail de toute cette bataille des Flandres d’avril 1918, je renvoie à l’étude si remarquable, parue sous la signature de M. Louis Gillet dans la Revue du 1er juin 1919.