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En temps normal, les fluctuations des changes ne sont généralement ni violentes ni considérables. Une sorte d’équilibre s’établit dans le commerce international, grâce auquel des excédents ou des déficits d’importations ou d’exportations se compensent par d’autres voies. La complexité des relations internationales est devenue telle que les tableaux des marchandises qui passent à la douane sont loin de représenter la totalité des échanges qui s’opèrent entre les divers pays. Ainsi la France, en 1913, importait plus d’objets qu’elle n’en exportait : 7 milliards d’un côté, 8 de l’autre. Elle semblait donc s’appauvrir annuellement d’un milliard. Il n’en était cependant rien. Elle encaissait, du chef des titres étrangers détenus en France et des dépenses faites sur son territoire par les voyageurs étrangers, un revenu d’au moins 2 milliards, qui compensait, et au delà, le déficit de ses exportations par rapport à ses importations : de là un afflux dans ses caisses de centaines de millions d’or, dont sa circulation s’enrichissait. La Grande-Bretagne exportait pour i 6 milliards, importait pour 19 milliards de francs de marchandises ; mais elle encaissait 5 ou 6 milliards de fret et de coupons de valeurs étrangères : elle aussi s’enrichissait. Si, au lieu de considérer l’ensemble du commerce extérieur de ces deux Puissances, nous examinons leurs relations réciproques, nous voyons qu’en 1913 nous exportions pour 1 450 millions de francs de marchandises en Angleterre et nous en importions pour 1 116 millions de francs. La différence de 335 millions n’influençait guère le change, qui oscillait aux environs de 25 fr. 20, avec de très faibles fluctuations en hausse ou en baisse. Il en était de même de notre change avec les États-Unis, avec l’Allemagne, avec l’Autriche-Hongrie, avec la Suisse, avec l’Italie, avec la Hollande, avec la Belgique, avec la Scandinavie. Le dollar se cotait aux environs de 5 fr. 18, le reichsmark à 1 fr. 23, la couronne austro-hongroise à 1 fr. 05, le franc suisse et belge au pair, la couronne scandinave à 1 fr. 38. Tous ces prix correspondaient à peu près mathématiquement à la teneur en or de ces diverses monnaies exprimée en francs français. Le solde actif ou passif de nos échanges avec les divers pays se réglait aisément, à défaut d’autres moyens de compensation, par l’envoi d’espèces métalliques, qui étaient puisées dans la circulation ou dans les réserves des banques, chargées de veiller à la stabilisation des