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semblé un baccalauréat de second ordre, et ne les avait pas attirées. Mais on a eu soin de proclamer l’égalité de toutes les sections du baccalauréat nouveau, et d’y mettre, sauf dans l’une d’elles, assez de latin pour faire croire aux jeunes filles qu’elles en ont fait, tout en en mettant assez peu pour qu’il ne leur coûte pas trop de peine.

Le baccalauréat, quand il ne s’adressait qu’aux garçons, était légèrement discrédité. La clientèle nouvelle lui refait une jeunesse. Il est à la mode. Si, pour quelques-unes, il est une précaution utile et la permission de continuer à travailler, pour d’autres, qui l’eût dit ? le baccalauréat est devenu une parure. On peut appeler la Sorbonne l’ « allée des demoiselles, » et appeler « mandarines » ces jeunes filles éprises de parchemins, ces plaisanteries sont la rançon d’une vogue et d’un succès. Le mouvement date de 1907 environ. Il bat son plein. Il fut accéléré par la guerre, qui produisit ici ses effets, comme partout. Beaucoup de bachelières de la veille trouvèrent un emploi dans l’enseignement ou ailleurs, à un moment où on eut besoin de tant de remplaçantes. Il sembla qu’une sorte d’harmonie préétablie les eût fournies à point. Puis, pour toutes les familles, les soucis du lendemain furent accrus. Les parents pensèrent, trop aisément peut-être, se montrer prévoyants en donnant le baccalauréat à leurs filles.

Il va sans dire qu’il relégua le brevet supérieur au second plan dans l’enseignement libre, quoique le brevet supérieur ait toujours sa clientèle propre, celle des futures institutrices, et aussi celle des personnes qui se défient des modes nouvelles. Dans l’enseignement public, ce ne fut pas seulement le brevet supérieur, mais le diplôme qui fut plus que menacé. Cela importerait peu, s’il ne s’agissait que de l’examen lui-même ; mais les études qui y mènent furent désorganisées, et l’équilibre savamment établi de ces études détruit. Le baccalauréat ne demande pas une petite place dans l’horaire, comme faisait autrefois le brevet supérieur. Il a des allures de conquérant. Il ne se subordonne pas. Si l’on ne peut le préparer et préparer le diplôme, c’est-à-dire suivre le cours normal des dernières années du lycée, c’est le diplôme, ce sont ces dernières années, dont le programme était cependant harmonieux et séduisant, qui seront sacrifiées, sans parler de celles qui précèdent. De telle sorte que l’enseignement secondaire des jeunes filles est, pour beaucoup