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lui, il allait tous les jours sur leurs ruines et, le crayon à la main, il établissait ses plans de reconstruction. Celui qui me le racontait et qui s’y connait en fait de courage, M. Ferré, de l’Echo du Nord, l’héroïque otage emmené en Lithuanie, disait en terminant : « Vous n’imaginez pas quel réconfort c’était pour nous de savoir que M. Le Blan préparait déjà son travail du lendemain de la victoire. » Mais ce n’est que depuis le mois d’août qu’il a pu se mettre à l’œuvre.

« On a enfin songé à nous, me dit-il. Les écluses se sont ouvertes par hasard à l’approche des élections. Comment les choses pourraient-elles bien marcher ? Il n’y a aucune unité de direction entre les différents services. Il nous fallait un homme, un haut commissaire. Nous regardons du côté de l’Alsace avec des yeux de parias. Mais il paraît que c’était inconstitutionnel. Nous gaspillerons donc notre temps et les deniers publics constitutionnellement. Tenez, un exemple. Les Commissions cantonales doivent constater et évaluer les dommages. Constater, c’est facile. Evaluer, c’est autre chose, dans un arrondissement comme celui de Lille où l’évaluation portera sur des propriétés de tout ordre et de toute nature, agricoles, commerciales, industrielles. Chaque Commission devrait réunir toutes les compétences ! Aussi vous comprendrez l’anxiété de ceux qui sont chargés de décider du sort des sinistrés. La loi a bien prévu un Comité technique qui élaborera des séries de prix ; mais son rôle est limité aux immeubles. L’évaluation des matières premières destinées à l’industrie, des produits en cours de fabrication et des produits finis, revient aux Commissions qui sont composées, selon l’expression du Sénat, de compétences élémentaires ! Et le nombre de ces commissions est considérable. Trente-sept pour l’arrondissement et onze pour les seuls cantons de Lille. Eh bien ! que voulez-vous qu’elles fassent ? Avec la meilleure volonté du monde, l’inégalité fatale de leurs décisions sera criante. Notre Chambre de Commerce demande que quelques-unes d’entre elles se spécialisent pour connaître de chaque industrie. Elles deviendraient ainsi intercantonales. Ce serait le seul moyen d’arriver rapidement à des solutions équivalentes et équitables. Et le chômage a trop duré ! Mais nous n’aimons pas les chemins directs et, en fait de compétences, nous n’acceptons à la rigueur que les plus élémentaires !… Le Service des Travaux de Première Urgence