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Il y demeure, — à part une interruption de deux années qu’il passe à la tête d’une compagnie d’infanterie à Thorn, — jusqu’en 1914, et y exerce différents emplois. Après d’assez courts séjours à l’Etat-major de la 9e division d’infanterie à Glogau et à l’Etat-major du 5e corps d’armée à Posen, il rentre définitivement à Berlin, soit pour y professer la tactique à l’Académie de guerre, soit pour faire partie du grand Etat-major. Il y reçoit les leçons de von Schlieffen que tous les officiers de sa génération considèrent comme un des plus grands généraux que l’Allemagne ait jamais produits. Il y est promu chef de bataillon (1900), lieutenant-colonel (1907) et colonel (1911). Dans ce temple de la doctrine guerrière allemande, il se taille une place de plus en plus marquée, et se trouve bientôt placé à la tête de la plus importante de toutes les sections : celle des opérations.

A ce titre, il est chargé de la confection du plan de concentration de toutes les forces nationales contre les adversaires éventuels de l’Allemagne. Travailleur infatigable, ardent patriote, fervent admirateur des idées de von Schlieffen, respectueux, mais peu enthousiaste du second Moltke qui porte un trop grand nom, il apporte tous ses soins à ce déploiement de début de campagne qui, dit-il, peut et doit être préparé de longue date.

En ce qui concerne la concentration contre la France, son esprit n’est effleuré par aucun doute : le chemin de Paris passe par la Belgique. La Belgique est neutre ? Il n’importe, puisque c’est seulement en violant cette neutralité que l’Allemagne peut abattre ses ennemis et prendre la place, — la première, — qui lui revient dans le concert des nations.

Mais, pour envahir la Belgique, il faut pouvoir pousser le rassemblement initial jusqu’à la frontière de Hollande. Or, au début de 1912 encore, les forces mobilisables ne le permettent pas ; il faut donc les augmenter. Et Ludendorff établit un projet de loi portant augmentation considérable de l’armée et accroissement d’un milliard du budget de la guerre. Nous savons trop, par les conclusions que nous en dûmes tirer nous-mêmes, que, sur ces points, il obtint gain de cause, mais ce que nous savions moins et ce qu’il nous apprend, c’est qu’il avait en même temps réclamé la constitution, dès le temps de paix, de trois corps d’armée nouveaux, car il n’avait foi, pour des opérations initiales à caractère rapide, qu’en des commandements