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de la Prusse, qu’elles étaient pratiquement irréalisables. En outre, rien ne pouvait être proposé dans ce sens avant deux ans. Le mouvement girondin était étouffé ; le jacobin unioniste prussien l’emportait. L’esprit décentralisateur fédéraliste était à l’agonie ; le traité de paix allait lui porter le dernier coup.


DANS L’ATTENTE DU TRAITÉ

C’est aussi dans l’ordre politique intérieur qu’agissait l’attente des conditions de la paix.

Les délégués allemands étaient partis pour Versailles le 28 avril. L’Allemagne attendait anxieuse. Les chefs énergiques et conservateurs qui commandaient l’armée se rendaient compte qu’ils ne pouvaient tenter aucune restauration avant que le sort du pays ne fût réglé. S’ils étaient maîtres de Berlin et auraient pu y proclamer l’Empereur, ils sentaient qu’ils ne seraient pas suivis par le pays. Le sabre du maréchal Foch était encore trop menaçant.

Le jeu des partis conservateurs consistait à galvaniser le pays pour le préparer au refus des conditions trop dures. D’abord, pour faire peur à l’Entente, on agitait le spectre du bolchévisme menaçant. Si la paix était inacceptable, le gouvernement ne pourrait empêcher l’explosion de colère du pays, qui, devant l’impossibilité de reprendre les armes contre les Alliés, se traduirait par la révolte communiste. Mais ce chantage était sans racines profondes et trop évidemment truqué. Le président du Reich, dans son message de Pâques, les ministres dans leur discours de Weimar continuaient bien à déclarer qu’ils ne signeraient jamais une paix de violence, que toute l’Allemagne se soulèverait plutôt. Là encore, ils étaient trop évidemment en contradiction avec le sentiment populaire qui voulait absolument la paix.

Et ce n’était pas seulement du parti socialiste indépendant qu’émanait le désir de la paix. C’était la masse populaire qui l’exprimait elle-même. Du 8 au 16 avril, avait eu lieu la deuxième assemblée générale à Berlin des conseils d’ouvriers et soldats. Elle avait été d’abord d’une modération politique extrême et s’était montrée nettement socialiste-majoritaire, c’est-à-dire gouvernementale. Mais il y avait beau temps que